ParaMag - n°298 - Mars 2012 - 30

PORTRAIT

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En 2003, à Lauterbrunnen, dernières recommandations de Zoo avant le départ. Collection Roch Malnuit Belle expédition au Pakistan avec les potes. "C'est un pays magique et les gens sont adorables (contrairement à ce que veulent nous faire croire les médias...)." Spot : Le Latok 2 Pakistan Karakorum, 7 108 m. Année : 2009 Collection Roch Malnuit

et en Italie. J’ai fait une fois un saut exceptionnel au Pakistan au cours d'une expédition de montagne. J'avais pris mon piège et ma wingsuit, au cas où. À 4 000 mètres d’altitude, je suis tombé sur un spot qui offrait 1 400 mètres de dénivelé. C'était un hasard et j'ai adoré ce saut un peu sauvage au-dessus d’une vallée au fin fond des montagnes du Pakistan. J'ai voyagé pas mal à l'étranger pour faire du snowboard et de la montagne, mais jamais pour le BASE, parce que l'occasion ne s'est encore jamais présentée. Je fonctionne par émulation avec les potes que j'ai ici à Chamonix. On ne m’a encore jamais proposé d'aller sauter ailleurs, au bout du monde. L'occasion se présentera peut-être un jour. Sinon, à Chamonix, je trouve tout ce que je veux. Dans un rayon de deux heures de route, il y a un joli nombre de spots exploitables, et d’autant plus avec la wingsuit. Je ne fais plus que ça depuis quelque temps. Tu ne sautes pas d’avion, comment as-tu donc commencé à la wingsuit ? Là aussi il est conseillé de se former en sautant d’avion… Roch : Je suis venu à la wingsuit à force de voir Jean-Noël Itzstein (adrenalinbase.com) partir avec ses ailes au cours de nos sorties en BASE que mon père et moi partagions avec lui. Ça m'a forcément titillé. J'ai d'abord commencé par fabriquer moi-même ma combinaison en rapportant des ailes double-face sur des vêtements Patagonia que je pouvais récupérer au magasin où je travaille.

Une fois ma confection terminée, j’ai fait trois ou quatre sauts de parapente pour voir si ça volait. Ça avait l’air de marcher pas trop mal et j’ai alors essayé en BASE, d’une falaise bien déversante. C'était il y a cinq ans, c'est-à-dire à la moitié de mon parcours de BASE jumper. Pour les débuts en wingsuit, j’ai suivi la même méthode que pour mon apprentissage en lisse. J'y suis allé par étape, en augmentant progressivement mes temps de vol. J'ai rapidement laissé tomber ma fabrication-maison pour quelque chose de plus performant. Ce fut la Phantom de chez Phoenix-Fly. Je saute maintenant en Vampire. Je n’ai fait qu’un seul saut d’avion en wingsuit. Quel genre de BASE jumper es-tu maintenant qu'il y a la wingsuit ? Roch : Je ne fais quasiment plus que ça. De temps en temps, je fais encore des sauts en lisse à l’issue d’une bonne grimpe sur des beaux spots comme la Dent du Géant ou le Cervin, par exemple. Maintenant que j'ai une famille, j'ai moins de temps à moi. Il y a aussi mes autres activités en montagne que j’aime tout autant que le BASE. Mes moments pour le BASE, je les consacre donc au meilleur et au plus long, c'est-à-dire la wingsuit. Mais je ne suis pas devenu réfractaire du saut en lisse. Je n’oublie pas les bonnes sensations qu’il procure. Il semble que le vol de proximité soit devenu l’ultime plaisir en wingsuit chez les BASE jumpers. Es-tu particulièrement en quête de ces sensations, quitte à prendre certains risques ? Roch : Le vol de proximité n'est pas forcément la «quête ultime» du BASE jumper. Pour en avoir discuté avec les uns les autres dans le milieu, je sais qu’il y a des wingsuiters qui ne recherchent pas ces sensations absolument. Beaucoup font de la wingsuit en BASE parce que c’est sympa de faire 1 minute 30 de vol, de se déplacer, de changer de

vallée en volant, de voir le paysage défiler avec une certaine hauteur. Grâce à la wingsuit, on profite déjà énormément du saut de falaise. Le BASE jump est devenu du vol tellement riche en sensation qu’il n’est pas forcément indispensable d'aller voir le relief de trop près. Certains le font très bien en minimisant les risques, d'autres en prennent trop à mon goût. Je pense qu'il ne faut pas assimiler la wingsuit et le vol de proximité. Nombreux sont ceux qui veulent profiter du vol, du paysage, du sport sans rajouter du risque à cette activité. Je comprends très bien que la montée d'adrénaline puisse être agréable durant des bons passages au ras des arbres et du relief, mais il faut s'en méfier. L'adrénaline est comme un médicament que l'on prend trop souvent. Il faut augmenter la dose pour toujours ressentir son effet. Après avoir rasé dix fois la cime des sapins et s'être posé surexcité, le wingsuiter sera tenté d’augmenter ses sensations, et il se mettra forcément en danger. C'est ce qui est arrivé à Jeb Corliss qui, à trop jouer avec sa limite et tenté de survoler le relief d’encore plus près, a touché à Table Mountain récemment. Et il y en quelques autres qui ont eu moins de chance que lui. Dans le genre de sport que nous faisons, on aime tous le rush d'adrénaline. J'aime bien une bonne pente raide en snowboard, j'aime bien aller du côté du relief en wingsuit, mais je suis conscient que l'adrénaline peut être notre maîtresse. Et quand on en est conscient, on arrive à doser. Je ne cherche pas la grosse dose d’adrénaline quand je m’engage. Je suis aussi un contemplatif, j’aime la montagne pour ce qu’elle m’apporte et je le vis déjà dans des situations suffisamment engagées. Avec toutes tes activités en montagne, on imagine que ton métier puisse se trouver dans tes passions. Est-ce le cas ? Roch : Non. Je suis vendeur dans un

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