ESCP ALUMNI magazine - #201 - Mars 2023 - 25

Dossier ❙ La stratégie Red Bull
cette année un événement qui s'appelle
la Red Bull Ocean Rescue à Biarritz, une
compétition de sauvetage mêlant running,
natation, kayak et même saut de falaise.
Évidemment, on n'a pas choisi Biarritz
par hasard : c'est une ville où la natation
et le surf sont deux disciplines majeures
et historiques. L'idée, c'est de créer et
superviser des formats de compétition que
tu peux décliner globalement, mais aussi
adapter à une audience plus localisée.
Aujourd'hui, Red Bull a aussi
largement investi dans les sports
plus mainstream, comme le
football. La marque est notamment
propriétaire du FC Red Bull
Salzburg et du RB Leipzig, deux
clubs qui disputent régulièrement
la ligue des champions...
P.V : Oui. On reste très impliqués dans les
sports extrêmes et de glisse, mais on a aussi
investi ce créneau-là, c'est vrai. Mais selon
des modalités qui nous sont propres.
C'est‑à‑dire ?
P.V : Nos équipes jouent un football
énergique, offensif, flamboyant, pratiqué
par de jeunes joueurs. Nos athlètes doivent
toujours pouvoir présenter et incarner
la marque.
L'entreprise a
intégré que le
sport devait
d'abord raconter
une histoire.
Red Bull veut
raconter le sport
différemment :
on met l'emphase
sur les sensations
et les émotions.
Vos équipes sont spectaculaires
et performantes, mais elles ne
dominent pas nécessairement leur
championnat respectif. Cela ne
semble pourtant pas vous poser
problème.
P.V : Red Bull recherche la performance,
bien sûr, mais, dans le football comme
ailleurs, l'entreprise a intégré que le sport
devait d'abord raconter une histoire. Red
Bull veut raconter le sport différemment :
on met l'emphase sur les sensations et les
émotions. La matrice des projets sur lesquels
on bosse, ce n'est pas la compétition, le
résultat pur et dur, mais le narratif que
portent ces projets en question. Les médias
de Red Bull - comme la Red Bull TV - ne
diffusent pas que des projets Red Bull, des
événements qu'on contrôle de A à Z. Si on
a l'opportunité de bosser avec une structure
sportive ou médiatique qui nous permet de
raconter un événement sportif comme on le
veut, c'est le plus important pour nous. On
ne va pas changer les résultats, mais axer le
narratif sportif sur d'autres éléments, oui.
La clé, c'est donc le narratif ? La
façon de mettre en scène et de
raconter le sport ?
P.V : Je pense que c'est fondamental,
effectivement. Red Bull a choisi de raconter
le sport autrement, et ça a payé. Ensuite,
ce narratif, il faut le diffuser, le promouvoir
et la valoriser. Tu peux créer, organiser
l'événement le plus grandiose du monde,
si tu n'as pas la plateforme qui te permet de
faire voir tout cela, tu n'as rien réussi. Pour
ce faire, on a notamment pu compter sur la
Red Bull Media House. C'est notre propre
pôle média, qui diffuse en direct sur internet
les compétitions que nous organisons, ou
dont nous sommes partenaires. Il produit
aussi des documentaires, des contenus
vidéos ou encore édite un magazine, le Red
Bulletin.
Est‑ce que les clubs, fédérations
ou compétitions sportives
traditionnelles ‑ comme les Jeux
Olympiques ‑ doivent repenser leur
narratif pour se moderniser ?
P.V : Pourquoi pas. Ce qui est certain, c'est
que Red Bull, via cette stratégie, a eu un
rôle important dans le développement
de certaines disciplines. Je pense aussi
qu'on n'a jamais perdu de vue une chose :
oui, créer de nouveaux événements ça
compte, mais les athlètes sont la chose la
plus importante. On commence toujours
par eux : si on ne les investit pas dans ce
qu'on fait, si nos formats de compétition
n'emportent pas leur adhésion, on ne
sera pas crédible sportivement. C'est aussi
comme ça que nos évènements ont duré
dans le temps : il n'y pas que les spectateurs
qui apprécient les spécificités qui les
caractérisent.
Le surf, l'escalade et le skateboard
ont intégré le programme
olympique des Jeux de Tokyo, en
2020. On retrouvera ces sports aux
JO de Paris, accompagnées d'un
nouveau venu : le breakdance.
Toutes ces disciplines ont pour
point commun d'être fortement
soutenues et médiatisées par Red
Bull.
P.V : Est ce qu'on a participé à crédibiliser
ces disciplines, pour en faire des sports
olympiques ? Oui, je le pense. Prenez le
breakdance : dès 2004, on a créé le Red
Bull BC One, une sorte de championnat du
monde annuel de la discipline. En résumé,
quand l'entreprise choisit de s'investir dans
une discipline sportive, elle met le paquet
pour que ça marche bien pour les athlètes.
Si, dans le processus, on peut faire grandir le
sport et les fédérations qui lui sont affiliées,
on ne va pas s'en priver.
❙
ESCP Alumni Magazine numéro 201 ❙ MARS 2023
❙ 25
ESCP ALUMNI magazine - #201 - Mars 2023

Table des matières de la publication ESCP ALUMNI magazine - #201 - Mars 2023
