ESCP ALUMNI magazine - #198 - Mai 2022 - 32

Carrière ❙ Parcours singulier
Par Alexandre Doskov
Les cent vies de Céline
Certains ont connu la Céline SANTINI (EAP 99) organisatrice de mariage. D'autres ont rencontré
la Céline SANTINI chef de projet, ou encore la formatrice. Mais depuis 2015, ce sont plus de
175 000 personnes qui lisent la Céline Santini autrice.
Céline SANTINI (EAP 99)
auteure
«
Ça c'est fait tout seul, je n'ai rien eu à
faire. » Dans un pays qui compte des
millions d'auteurs n'ayant jamais
réussi à être édités, la façon dont Céline
Santini parle de la publication de son premier
ouvrage semble presque insolente.
Ce premier livre, un guide présentant
des idées de mariages originaux sorti en
2007, ne l'a pas tout de suite menée à sa
carrière d'autrice. Mais Céline ne peut le
nier : « Il y a eu une petite graine de déposée
à ce moment-là. » C'était l'époque où Céline
Santini était wedding planner, près d'une
décennie pendant laquelle elle a organisé
des mariages pour une clientèle haut de
gamme d'étrangers qui venaient se dire oui
en France. Comme pour son livre, la chose
s'est faite un peu toute seule. « J'ai organisé
mon propre mariage en 2003, explique t-elle.
Ce métier n'existait pas encore en France.
Plusieurs agences se sont créées la même année,
dont la mienne. » Avec cette activité, Céline
pouvait se servir de l'expérience emmagasinée
lors de ses carrières précédentes « C'était
mon métier, de la gestion de projet, mais appliquée
aux mariages. » Mais surtout, cela lui a
permis d'ouvrir sa propre entreprise. Une
aspiration qui l'accompagnait depuis le
temps des bancs de l'école.
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J'avais dans un
coin de ma tête,
l'idée de créer
mon entreprise
un jour, mais je ne
savais pas quand
ni comment.
Mise au parfum
Pourtant, Céline Santini s'était engagée sur
le chemin de l'EAP (qui a fusionnée avec
ESCP en 1999) sans savoir où elle mettait
les pieds. Le cursus international proposé
lui plaisait, « Mais c'était à peu près tout ce
que j'avais comme information », se souvient-elle.
« Je me suis dit école de commerce,
ça reste généraliste. Ça me permettait de différer
mes choix de vie. J'avais dans un coin de ma
tête de créer mon entreprise un jour, mais je ne
savais pas de quoi. » Ces trois années lui ont
permis de gagner du temps. Elles l'ont aussi
conduit à vivre en Espagne et en Angleterre,
un bon moyen de tester son indépendance
et sa débrouillardise, surtout au moment
de trouver un stage. Internet n'étant alors
qu'un outil balbutiant, Céline a épluché les
annuaires jusqu'à tomber « par hasard » sur
des entreprises du secteur de la parfumerie.
Puis elle a enchainé les stages et officié
comme fragrance development manager
après la fin de ses études. Souci : la culture
de l'entreprise, les procédures et les protocoles
la crispent rapidement. De façon
ESCP Alumni Magazine numéro 198 ❙ MAI 2022
plus globale, Céline se rend compte que
le milieu du luxe ne lui correspond pas.
Une démission plus tard, elle transpose
ses compétences en gestion de projet dans
des agences de design, où elle ne tient pas
beaucoup plus longtemps. « Je fais vite le
tour des choses. Au bout de deux ans et demi,
je change. C'est une caractéristique propre aux
multi-potentiels. »
Du blog que personne ne lit aux
rayons des librairies
C'est dans la foulée de cette expérience que
Céline a ouvert son entreprise d'organisation
de mariages, un métier qu'elle exercera
neuf ans. « J'aurais voulu arrêter bien avant,
sauf qu'on a toujours un mariage qui est prévu
pour dans un an, deux ans... À chaque fois je me
disais ''j'arrête'', mais j'avais toujours de nouveaux
mariages. » Pour sortir de cette boucle,
Céline a besoin d'un point de rupture.
De plusieurs, même. En 2010 sa fille nait.
En 2011 elle divorce et doit élever le bébé
seule. En 2012 sa mère décède. « En plus,
c'est un suicide. C'est moi qui trouve le corps, il
y a un truc un peu choquant. Tout ça était assez
intense comme période de vie. » Bel euphémisme.
Le lendemain du décès, en une
matinée, Céline clôt ses dossiers et ferme
sa boîte sans avoir de plan pour la suite.
« C'était pour survivre. Une évidence. Le déclic
que j'attendais depuis plusieurs années. » Pour
se reconstruire, elle plonge dans le développement
personnel, lit tout ce qu'elle trouve
sur le sujet. Elle envisage un temps de faire
de cette nouvelle passion un métier, hésite
à devenir coach, mais démarre finalement
un blog. « L'écriture sortait spontanément, une
sorte d'élan irrépressible. Personne ne lisait ou
presque, mais dix heures par jour, j'écrivais. Je
ne comprenais pas pourquoi je le faisais, mais
j'ai continué. Je voyais bien que ça n'allait pas
me faire gagner ma vie, mais j'avais ce besoin. »

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