ESCP ALUMNI magazine - #194 - Été 2021 - 89

VIE DES ENTREPRISES
AÉRONAUTIQUE & ESPACE
L'industrie aéronautique face à la crise
L'aéronautique est l'une des victimes les plus frappées par la crise
économique provoquée par le coronavirus. Christian SCHERER (84), directeur
commercial d'Airbus, retrace son parcours professionnel et nous en dit
davantage sur le sujet.
Christian SCHERER (84)
Pouvez-vous résumer
brièvement votre parcours.
J'ai commencé chez Airbus en CDD en 1984,
contrat qui dure depuis 37 ans maintenant !
Tout d'abord administrateur de contrats puis
expatrié aux États-Unis, de retour en France j'ai
construit l'équipe qui a développé le business
avec les loueurs. On m'a ensuite demandé de
prendre la tête de la direction de la stratégie
d'Airbus puis j'ai rejoint la division défense en
Allemagne en tant que directeur commercial. J'ai
ensuite été PDG d'ATR et depuis 2018 me voici
de retour là où tout a commencé, à la direction
commerciale des avions civils avec en plus la
responsabilité de la dimension internationale
du groupe.
Vous avez travaillé dans l'aéronautique
durant toute votre carrière, est-ce par
passion ? N'avez-vous jamais été tenté
de découvrir un autre secteur ?
Je baigne dans le milieu aéronautique depuis
mon enfance. Même si à l'origine ma passion
était d'abord tournée vers la marine, j'ai moi
aussi attrapé ce virus (bénin !) de l'aviation. C'est
grâce à cette passion que l'aéronautique s'est
construite et qu'elle pourra relever les défis
futurs, sur le plan environnemental notamment.
Mais contribuer au défi d'une construction
européenne, à opposer à l'hégémonie
américaine, est ma véritable motivation au-delà
de la passion pour les navires volants.
Le secteur de l'aéronautique est
certainement un des plus impacté par la
crise sanitaire. Qu'en est-il aujourd'hui ?
Jamais, depuis la deuxième guerre mondiale,
le transport aérien n'a connu un tel
chamboulement. Les compagnies aériennes ont
vite dû s'adapter face à cette baisse drastique de
la demande et nous avons fait de même. Même
si nous aimerions que la situation s'améliore plus
vite, nous sommes optimistes que la reprise
sera là dès que les campagnes de vaccination
porteront leurs fruits.
Il faudra sans doute attendre la moitié de cette
décennie pour un retour au niveau d'activité
que nous connaissions avant la crise, mais les
fondamentaux de l'industrie sont toujours
présents.
Comment avez-vous vécu cette
période au sein d'Airbus ? Comment
vous êtes-vous adapté ?
Dans l'absolu, c'est fascinant, si l'on fait abstraction
des souffrances collectives et individuelles !
Après toutes ces années d'effervescence sur un
marché en forte croissance, nos commerciaux
ont dû retourner à l'essentiel : la gestion de la
relation commerciale. Face à des clients aux
abois, il nous a fallu prendre le taureau par les
cornes. Les relations dans notre industrie se
construisant dans la durée, il nous a fallu faire
preuve de fermeté tout en restant constructif.
Tout au long de la crise c'est la force de la mission
qui a permis aux équipes de rester motivées.
Airbus compte sur nous, encore plus qu'avant,
pour assurer un maximum de revenu et ainsi
passer cette tempête en limitant les dégâts.
Comment appréhendez-vous la reprise ?
Nous pouvons observer différentes approches,
quant à la sortie de crise. Nous devons donc
encore gérer la crise avec certains clients alors
que d'autres débutent la reprise. C'est un grand
écart qu'il nous faut gérer au quotidien. La
gestion des ressources humaines est encore
plus importante en temps de crise. L'incertitude
permanente et les nombreuses adaptations qui
en découlent amplifi ent le stress sur les équipes
et les managers. Il nous faut nous adapter vite et
souvent en tenant compte des personnes car
ce sont elles qui font la différence. C'est d'autant
plus un défi qu'il nous faut en même temps
limiter les coûts au maximum. J'ai confiance
que, comme sur le plan technique, c'est par
l'innovation que nous y arriverons.
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