ESCP ALUMNI magazine - #193 - 1er trimestre 2021 - 28

Dossier ❙ Vivre dans un monde incertain

Par Adrien Candau

Le grand challenge d'Ophélie
Que faire quand le confinement vient subitement couper la route d'un
projet jusqu'ici prometteur ? Ophélie LE GRAND, fondatrice de LOKALERO une start-up qui aide à financer des projets associatifs locaux - a dû repenser
une bonne partie de sa stratégie d'entreprise, mise à mal par la crise de
la covid-19. L'idée ? Conserver l'essence du projet initial, tout en le faisant
astucieusement pivoter pour s'adapter aux nouveaux impératifs sanitaires.

Ophélie LE GRAND (17)
Fondatrice de LOKALERO

mmanuel Macron est formel.
Regard compassionnel, main croisées et cravate noir rangée dans
son costume cintré, le président de la
République - qui vient d'annoncer mi-octobre la mise en place d'un couvre-feu
dans les métropoles les plus touchées par
la covid-19 - concède que « c'est dur d'avoir
20 ans en 2020. » Si les confinements successifs ont mis à l'épreuve la patience de la
jeunesse de France, ils ont aussi chamboulé
les plans de ses néo entrepreneurs. Ophélie
Le Grand est l'une deux. En 2018, à tout
juste 22 ans, cette diplômée du Master en
Management d'ESCP a fondé LOKALERO,
une start-up qui aide à financer par des particuliers des projets associatifs locaux. « Lors
de mes divers stages pendant mon cursus à
ESCP, je me suis beaucoup investie et ce, dès la
première année, auprès d'entrepreneurs sociaux.
Notamment au sein de microDON une start-up
qui développe l'arrondi sur salaire et l'arrondi
en caisse et reverse les sommes collectées à

❙

des associations. » Un système solidaire, qui
permet d'efficacement irriguer en dons de
grandes ONG. Inspirant pour Ophélie, qui
songe alors à développer une solution specifiquement optimisée pour financer des
initiatives et organisations plus modestes.
Une fois diplômée, la voilà qui lance donc
LOKALERO. Le but ? Aider les associations
locales, plus confidentielles, à se financer,
en les mettant en relation avec les usagers
de leur quartier. Le concept original du projet est simple, mais efficace : les commerces
de proximité paient un abonnement mensuel, pour intégrer le réseau des professionnels solidaires LOKALERO. Ce faisant, une
borne est installée dans leur boutique, que
les clients peuvent consulter selon leur bon
vouloir, pour s'informer sur les associations
locales membres du réseau LOKALERO
et leur verser une contribution financière.
« L'idée, c'était d'impliquer plus activement
les usagers des commerces de proximité dans la
collecte de dons et l'émergence de projets locaux
décrypte Ophélie. La borne, qui est un support physique, était censée stimuler l'échange,
on pouvait la consulter rapidement en situation d'attente dans un commerce par exemple,
puis en parler autour de soi, aux autres clients
présents. »
Confinés, mais pas sans idées
L'expérience est prometteuse, mais
relativement éphémère. Le 17 mars 2020, le
confinement général enferme tout le monde
à la maison. Le concept de LOKALERO , en
partie pensé autour de sa borne - censée

ESCP Alumni Magazine numéro 193 ❙ 1er TRIMESTRE 2021

fluidifier le lien et la proximité entre les
associations locales, les commerçants et les
habitants du quartier - en prend un sacré
coup. Ophélie doit réagir, et vite. « Passé
les premiers moments de flottement, on a vite
décroché nos téléphones pour contacter les
associations partenaires pour les rassurer, leur
expliquer comment et pourquoi il était toujours
légitime de communiquer sur leurs actions, en
temps de confinement. » LOKALERO a alors
tout une partie de son modèle à repenser
« On a dû abandonner les bornes et envisager
une idée alternative » poursuit Ophélie. En
interne, l'équipe technique de la firme se
triture les méninges pour mettre au point
en un temps record une solution digitale de
collecte des dons via smartphone. Le 5 mai,
LOKALERO lance sa webapp de dons,
don-local.org. Elle donne la possibilité
aux utilisateurs de soutenir les causes
proches de chez eux, en filtrant leurs zones
géographiques de préférence et le type de
projets qu'ils souhaiteraient financer (santé,
environnement, culture etc...). Si la borne
n'est plus, l'idée de recourir à un support
physique n'est pas enterrée pour autant. Le
cas de la Ferme pédagogique d'Ecancourt
(Ile-de-France), qui accueille gratuitement
des groupes scolaires pour les sensibiliser
aux thématiques environnementales et de
la vie animale, illustre bien la nouvelle
stratégie opérée par LOKALERO. Pendant
le confinement, cette structure associative
a pu recourir aux nouvelles solutions
digitales proposées par la start-up, pour
faire un appel aux dons et continuer ainsi de

http://www.don-local.org

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