ESCP ALUMNI magazine - #193 - 1er trimestre 2021 - 27

Dossier  ❙  Vivre dans un monde incertain

et réactive des soucis. Il faut décomposer les
problèmes petit morceau par petit morceau.
La navigation m'a appris cela. Et cet état
d'esprit m'est utile au quotidien.

C'est un impondérable sur un
bateau ?
Je pense qu'on a tous les temps de
l'incertitude en mer, qu'il y ait de la glace
ou qu'il n'y en ait pas. Il y a plein de
choses qui peuvent casser sur le bateau, il
y a toujours quelque chose à réparer. Un
dicton dit d'ailleurs, qu'on a un souci par
jour sur un bateau. En mer, il faut composer
quotidiennement avec des événements
imprévus.

Comment réagir justement devant
une avarie, une galère, une situation
inopinée ?
L'essentiel, c'est de les affronter en équipe,
de se faire confiance. C'est très important
dans des situations extrêmes, notamment
quand on est en dette de sommeil. Cela te
permet de prendre ton quart et de savoir
que quand l'autre prend une décision, il
la prend lucidement, au maximum de ses
capacités. Plus prosaïquement, quand on a
10 000 galères à bord, on les prend une par
une, sinon on ne s'en sort pas, il faut gérer
problème par problème !
Qu'as-tu appris de tes navigations
qui peuvent t'aider pendant ta vie
professionnelle ?
La navigation ressemble beaucoup à
l'entrepreneuriat. Je n'ai pas une grosse
carrière dans le domaine mais monter le
projet  du passage du Nord-Ouest, aller
chercher des fonds, trouver le bateau c'est
déjà en soit, de l'entrepreneuriat ! Quand
on entreprend, comme en mer, on a une
galère, un problème à résoudre tous les
jours. Mon expérience de navigatrice
m'a appris à les gérer un par un, à faire
abstraction des prévisions lointaines. Il
faut déjà penser à ce qui va se passer dans
24 heures pour résoudre les problèmes. Bien
sûr, il faut une vision à plus long terme, mais
cela commence une gestion quotidienne

ESCP Alumni Magazine numéro 193  ❙  1er TRIMESTRE 2021

Tu travailles actuellement sur un
projet entrepreneurial ?
Oui, j'ai d'abord monté une entreprise de
cours qualitatifs de voile en ligne, avec des
formateurs spécialisés, mais je suis en train
de faire évoluer mon projet. Je ne sais pas
si mes futurs projets d'entrepreneuriat se
cantonneront à la voile mais une chose est
sûre : je veux pouvoir garder la liberté de
naviguer l'été en Arctique ! Il y le passage
du Nord-Ouest, mais aussi celui du
Nord-Est, le Spitzberg. Dans l'Arctique,
on navigue dans des endroits totalement
sauvages, où l'on ne croise absolument
personne à part des ours polaires. Dans
certains mouillages, aucun bateau n'est
passé depuis 200 ans, c'est complètement
dingue. Toutes les galères on les oublie
vite, l'émerveillement permet  de passer
au-dessus de l'incertitude et de moments
de stress. 
❙

Clara Dumard en 5 dates :
1999 : Découverte du récit Apoutsiak,
le petit flocon de neige de Paul Emile
Victor, lu par son père. Il partage
avec elle ses désirs de grand nord
et ensemble, ils rêvent d'un tour du
monde par les pôles.
25 mars 2001 : décès de son grandpère, Clara se jure d'être un jour, une
aventurière comme ses grand-parents
(son père, sa tante et ses grands-parents ont fait le tour du monde à la voile
pendant 4ans. Elle a grandi avec leurs
récits d'aventures.
Septembre 2016 : Elle reprend son
rêve d'enfant en main et commence la
voile à l'université de Nantes
1 er Juillet 2018 : Grand départ de
France pour l'Arctique à la voile, avec
son père.
9 Septembre 2019 : Rentrée au MSIE
ESCP à peine quelques jours après
le retour de sa seconde expédition
arctique

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