ESCP ALUMNI magazine - #193 - 1er trimestre 2021 - 18

Dossier  ❙  Vivre dans un monde incertain

Par Alexandre Doskov

« Je sais que je ne sais rien »
Dire que 2020 a créé un monde incertain est un doux euphémisme. Peu importe qu'ils aient
découvert l'incertitude avec la crise liée à la pandémie de Covid 19 ou qu'ils y aient déjà été
confrontés auparavant, les acteurs du monde du travail ont dû réinventer leur manière de
travailler dans un contexte où les habitudes et les repères vacillent. L'occasion de bousculer les
certitudes et de faire émerger de nouvelles pratiques positives. Et si l'incertitude était, parfois,
un mal pour un bien ?

L

' av i o n q u i ra m e n a i t C é l i n e
Gallon (09) de son tour du monde
s'est posé à Paris au début du mois
d'avril 2019. « Je crois que je suis rentrée vers
le 3 », tente-t-elle de préciser en fouillant
dans ses souvenirs brumeux. Il faut dire
qu'à l'époque, elle n'a pas vraiment eu le
temps de s'attarder sur les dates. À peine
revenue de ce voyage qu'elle s'était offert
après avoir officié dans de grands groupes
comme la BNP Paribas ou la MACIF pendant une dizaine d'années, elle remet tout
de suite le pied à l'étrier : « J'ai commencé
chez Kearney le 5 avril. J'étais vraiment dans
un autre monde, je me suis dit que reprendre
une vie professionnelle à Paris comme avant,
ça n'avait aucun sens. » Passer d'un quotidien
de globe-trotter à celui de conseillère en
stratégie sans sas de décompression peut
être déroutant, certes. Mais ce retour brutal à la vie réelle l'a également poussée à
se poser des questions sur ses choix et sur
leur sens : « Je revenais de ce tour du monde
et ça m'a totalement déstabilisée sur ma vie
professionnelle. J'étais assez perturbée, je me
suis repris un engagement professionnel délirant
avec des horaires complètement fous, tout ce
qu'on peut imaginer du cabinet de conseil en
stratégie. Et en plus, je n'étais pas du tout à ma
place dans le conseil puisque je suis quelqu'un
d'extrêmement opérationnel. J'ai été malheureuse sur beaucoup d'aspects, cette histoire avec
Kearney a assez vite tourné au vinaigre... » Une
phase d'incertitude et de confusion dont
elle n'est sortie qu'à l'été 2020, quand elle a
été recrutée par la plateforme de streaming
et de téléchargement Qobuz en tant que
chief people officer. Au-delà de retrouver

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un poste dans lequel elle s'épanouit, Céline
Gallon a surtout eu la chance de décrocher
un contrat deux semaines après avoir postulé, le tout à une époque où le marché du
travail était malmené par la pandémie. Elle
souligne « un process d'une rapidité époustouflante » qui lui a permis de s'épargner une
trop longue période de flottement.
Nour Heneine (18) aussi, a dû trouver un
emploi alors que le monde était paralysé par
le virus. C'est à l'hiver dernier, alors qu'elle
revenait d'une expérience professionnelle
en Italie, qu'elle a vécu cette situation
aussi particulière qu'inconfortable. « C'était
assez compliqué puisque j'étais en recherche

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d'emploi dans une ville que je ne connaissais
pas. Je n'avais pas de réseaux très solides, pas
vraiment mes marques. Il y a eu un petit effet de
panique, très franchement, parce qu'avec le
début de la pandémie on s'est tous dit ''OK,
tout va changer, toute la structure du
marché va changer, tout va ralentir.'' » Ces
quelques mois d'inquiétude ont finalement
pris fin en mars quand elle a été embauchée
comme private partnership officer au sein de
l'ONG Solidarités International, alors que la
France était déjà plongée dans la torpeur du
premier confinement.
Que l'on soit confronté à une recherche
d'emploi dans un contexte imprévu, lancé
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