ESCP ALUMNI MAGAZINE - #192 - NOVEMBRE/DÉCEMBRE 2020 - 20

DOSSIER  ❙  Décider, c'est gagné ?

estime cette serial entrepreneuse qui
a lancé sa première société dédiée aux
cosmétiques masculins chez elle, avant
de racheter avec son associé les 3 Suisses
en 2018, puis Rue du Commerce, il y a
à peine 6 mois.

Décider seul ou à plusieurs ?

Alexandre PEBEREAU (87)
CEO de Tofane Global

et y penser tout le temps ». Pour éviter cet
écueil de la décision pas claire, Alexandre
a une ligne de conduite : « si c'est flou
c'est qu'il y a un loup ». Alors mieux vaut
parfois se montrer patient, et s'interroger
pour être pleinement convaincu du
bienfondé de sa décision avant de
la prendre. C'est en tout cas la méthode
de Michel DE ROVIRA : « Pour prendre
une décision qui a un enjeu d'éthique, je me
pose trois questions : serai-je à l'aise avec
ma décision ? pourrai-je me regarder dans
le miroir de la même manière qu'avant,
une fois la décision prise ? Et pourrai-je
en parler facilement avec mes enfants ? »
poursuit-il. Dans cette démarche,
la part du personnel, de l'intuition, de
l'émotion est tout aussi importante que
le volet rationnel. « C'est la combinaison
des deux qui fait qu'un chef d'entreprise
prend une bonne décision. Cela ne peut pas
être de la programmation informatique ou
un coup de tête ». Élevée aux États-Unis,
où la culture entrepreneuriale valorise
l'erreur, Karine SCHRENZEL  (03)
elle est partisane de l'idée « qu'un chef
d'entreprise et un  manager doivent
apprendre de leurs erreurs pour rebondir et
se remettre en question. Faire le bon choix,
c'est aussi reconnaître ses erreurs. Ne pas
rester prisonnier de ses décisions et envisager
des améliorations et des changements »

  ➔ 

Depuis une  dizaine d'années,
sous l'influence des sciences
comportementales, le management
a énormément évolué, tendant de
plus en plus vers un  management
participatif, où il s'agit davantage de
convaincre que d'imposer. L'entreprise
valorise aujourd'hui plus le collectif, le
travail collaboratif que le leadership.
Dès lors la  manière de décider à
aussi évolué. Désormais, chacun doit
comprendre le sens de la décision, pour
l'accepter. En favorisant l'adhésion et
l'engagement, on ne se retrouve pas
avec une décision qui convient à tout
le monde, mais avec une décision qui
n'est rejetée par personne. L'absence
d'opposition et l'adhésion permettent
de faciliter l'appropriation de la décision
dans un premier temps et son exécution
dans un second temps. « Il est évident
que la personne qui a la responsabilité de
prendre des décisions ne peut pas s'isoler,
décider seule et attendre que les autres
la suivent et exécutent sa décision », note
Aldo CARDOSO. Toutes les parties
prenantes doivent être conscientes de
la nécessité de prendre une décision,
de changer quelque chose, de prendre
une nouvelle trajectoire : « chacun doit
pouvoir donner son avis et partager son
point de vue. C'est en débattant avec tous
que le décideur doit arbitrer, expliquer et
imposer sa décision ».

décision collective est, quant à elle, le fruit de
différents points de vue, idées et avis. Elle est
riche et porteuse de valeur. Néanmoins, elle
présente un risque à ne pas sous-estimer :
le consensus mou qui amène à des décisions
qui ne sont pas assez tranchées ou sans
grande valeur ajoutée pour l'entreprise »,
estime Nicolas d'AUDIFFRET. Ou les
« décisions pas claires » qui font peur à
Alexandre PEBEREAU (87).
Pour Michel de ROVIRA, décider
à plusieurs soulève la  question
de la  délégation, et cela  plus
particulièrement dans une structure
où il y a plusieurs fondateurs ou
dirigeants. « Avec Augustin, nous avions
délimité le périmètre d'action et de prise
de décision de chacun d'entre nous. Mais
nous nous consultions régulièrement sur
des problématiques particulières pour avoir
un autre regard ou opinion. Par contre, pour
des décisions stratégiques, comme la prise
de participation de Danone au capital, le
choix de notre directeur général ou encore
le déploiement aux États-Unis notamment,
nous y réfléchissions ensemble et il nous
arrivait aussi d'impliquer un  tiers  :
un administrateur, un collaborateur ou
une personne de l'extérieur ».
Le nombre de collaborateurs présent
dans l'organisation, la maturité de

Si décider collectivement a des avantages
avérés, ce n'est pour autant pas sans
risque. « Le danger quand on décide seul
est de passer à côté de certaines choses. Une

Michel DE ROVIRA (97)
Co-fondateur de Michel & Augustin

«Le consensus mou amène à des décisions
qui ne sont pas assez tranchées. »
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