Repères - n°28 / Février 2016 - Le magazine de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire - (Page 20)
EN DÉBAT
Les citoyens mesurent
eux-mêmes la radioactivité
Information. La difficulté des autorités japonaises à communiquer a suscité
la méfiance des citoyens, qui se regroupent pour mettre en place des mesures
radiologiques sur le territoire. Azby Brown, acteur du projet Safecast au Japon,
et Jean-François Bottollier-Depois, responsable d'Openradiation en France, débattent
des bénéfices de ces réseaux.
Quel rôle a joué Safecast dans le débat
public sur Fukushima ?
Azby Brown : Le projet est parti de
deux constats. Les informations disponibles sur la radioactivité faisaient
défaut. Le grand public n'avait plus
confiance dans les sources gouvernementales et officielles. L'objectif
"
En France,
Openradiation
permettra d'acquérir
et de centraliser
des mesures de dose
provenant du terrain
en nombre important.
Olivier Seignette/Mikaël Lafontan/IRSN
"
était de faire preuve d'une absolue
transparence, grâce à des outils open
data et open source, pour fournir une
source d'informations crédible, indépendante et non partisane. Aider les
populations à rassembler des données de base de la dose due à la
radioactivité dans l'environnement
pour montrer ce qui est "normal",
et les impliquer dans un processus
éducatif, sont des composantes du
programme. Le développement des
sciences citoyennes est une tendance
mondiale.
La France n'a jamais connu d'accident
radiologique grave. Pourquoi mettre
en place une surveillance avec des
données du public ?
Jean-François Bottollier-Depois :
Les initiatives comme Safecast sont
importantes pour obtenir une grande
quantité de données recueillies par
les citoyens après Fukushima. Sur la
base de cette expérience, nous avons
créé une application dosimétrique
dans l'esprit de Safecast et un site
Internet pour centraliser les données
et échanger. Chacun peut faire des
commentaires sur une mesure en
particulier, sur un point chaud*
par exemple. Cet outil permet à ses
utilisateurs, membres du public, de
s'approprier de manière courante
la problématique de l'exposition
à la radioactivité. En cas de crise
nucléaire, les données collectées
pourraient être utilisées en situation
d'urgence radiologique.
Safecast est une initiative privée,
venant du terrain. Un projet comme
Openradiation peut-il mobiliser
les individus ?
J.-F. B.-D. : L'IRSN est certes un institut
public, mais deux de nos partenaires
sont des associations impliquées dans
le milieu éducatif. Nous ne savons pas
aujourd'hui si la population se mobilisera autour d'Openradiation. Nous
essayons de l'inciter en utilisant des
outils pédagogiques. La confiance des
citoyens repose sur la transparence.
C'est la raison pour laquelle nous
publierons toutes les données brutes
que nous recevrons.
A.B. : Le public est sceptique quant à
la motivation des organes officiels à
communiquer des informations sur les
risques. C'est indéniable. Il convient
néanmoins de garder ces instances
en haute estime. Au Japon, le gouvernement a perdu la confiance de la
population à cause de son manque de
Jean-François Bottollier-Depois
Physicien responsable du service de dosimétrie externe de l'IRSN, il pilote Openradiation, initiative
que l'Institut a lancée avec l'Université Pierre et Marie Curie et des associations*. L'objectif est
de développer des outils de mesure et une plateforme Internet, offrant aux citoyens la possibilité
de partager leurs données ou d'obtenir des informations.
* L'Institut français des formateurs risques majeurs et protection de l'environnement (IFFO-RME) et Planète Science
20 I Repères N°28 I Février 2016
Table des matières de la publication Repères - n°28 / Février 2016 - Le magazine de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire
Couverture
Kiosque
Sommaire & Édito
TEMPS FORTS
Surveillance de l’environnement, évaluer l’exposition aux rayonnements ionisants
La gestion d’un accident de fusion du coeur d’un réacteur
FAITS & PERSPECTIVES Mieux protéger les installations nucléaires après Fukushima
INTÉRÊT PUBLIC Sensibiliser les acteurs locaux à la radioactivité
DOSSIER RADON Mobiliser la société civile
EN PRATIQUE Contamination oculaire, comment réagir ?
EN DÉBAT Les citoyens mesurent eux-mêmes la radioactivité
STRATÉGIE La stratégie scientifique pour les dix ans à venir
Repères - n°28 / Février 2016 - Le magazine de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire
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