ParaMag - n°335 - Avril 2015 - 10

aveugle_335_Couv 30/03/2015 14:24 Page 1

SPÉCIAL

Début du vol en aveugle pour Jhonathan Florez, suivi de son guide.

WINGSUIT EN AVEUGLE

JHONATHAN FLOREZ : "N'ESSAYEZ PAS ÇA CHEZ VOUS !"
D'après une interview de Jhonathan Florez, par Bruno Passe

Équipé d'une wingsuit, le parachutiste colombien Jhonathan Florez a réalisé en mars dernier un saut totalement "en aveugle",
jusqu'à l'atterrissage. Il a rendu opaque la visière de son casque intégral et n'a retrouvé le visuel qu'après son arrivée au sol
(un peu rude). Il était en contact radio et guidé par un compère qui l'accompagnait en vol. Il a effectué cette cascade pour
défendre la cause de son ami Juan Pablo, un autre parachutiste colombien, condamné à l'emprisonnement à vie au Qatar.
Dans cette interview, Jhonathan Florez explique en détails le déroulement de son saut en aveugle. Son commentaire le plus
important à retenir est : "N'essayez pas ça chez vous !"

Avril15:335
paramag.fr

Jhonathan Florez est un parachutiste
de l'extrême, BASE jumper et wingsuiter
réputé aux États-Unis et en Amérique du
Sud. Il est membre de l'équipe de démonstration Red Bull Air Force. Ses exploits en
wingsuit ont été occasionnellement publiés
dans ParaMag. En avril 2012, le Colombien
avait établi trois records du monde en un
seul saut en wingsuit effectué à 10.700
mètres d'altitude, par moins 45 degrés
(cf. ParaMag 301 de juin 2012).
Ses performances ont été enregistrées
sur GPS puis homologuées afin de paraître
dans le Guinness Book des Records.
Bien que Jhonathan Florez revendique
ce saut en aveugle comme étant une
première mondiale, il semble qu'une
cascade identique a déjà été réalisée
en 2014 pour un spot de promotion
sur l'armée de l'air néerlandaise
(voir le lien en encart).

et pour mon entourage durant le saut.
Mon plan était de sauter en dernier de
l'avion avec une grande wingsuit, pour être
certain de rester au-dessus de tout le
monde et de ne mettre personne en danger
puisque j'évoluais plus lentement que tous
ceux qui ont sauté avant moi. J'ai ouvert
également beaucoup plus haut et il n'y
avait pas d'autres avions prévus après ce
dernier largage. J'étais en contact radio
air-air avec Rex Pemberton, un autre
parachutiste qui me suivait en vol et qui
me guidait. J'avais deux altimètres sonores
pour m'indiquer les hauteurs.
À la radio, avant mon atterrissage,
Rex me confirmait que tout le monde était
bien posé. J'ai sauté avec une grande voile :
une Spectre 170 qui laisse une grande
marge d'erreur et me permettait de rester
un peu plus longtemps sous voile pour me
poser en dernier.

Comment as-tu préparé ce saut sur le
plan technique ?
J'ai pris les mesures nécessaires pour
organiser ça en sécurité, pour moi

Comment aurais-tu procédé si la radio
était tombée en panne ?
Nous avions prévu un plan B en cas de
perte de communication de plus de 10

secondes : j'ouvrais simplement ma visière !
En effet ma visière était complètement
recouverte d'adhésif occultant,
mais elle pouvait être ouverte à n'importe
quel moment du saut.
Sur la vidéo on voit que l'atterrissage
a été brutal, pourquoi ?
L'atterrissage a été brutal car je n'ai pas
entendu clairement les ordres donnés
à la radio et j'ai freiné trop tard.
Je m'étais entraîné à un freinage lent et
progressif qui aurait pris 3 ou 4 secondes.
Si je devais refaire ce saut en aveugle,
je m'entraînerai davantage sur un atterrissage plus classique et je modifierai les
ordres à donner à la radio par :
"Prêt à freiner dans 3.2.1. Freines 1.000
2.000 3.000"
Est-ce que tu recommencerais volontiers
cette expérience ?
Ouais, je le referai, car cette expérience
dépasse tout ce que j'ai déjà ressenti
avant. J'ai utilisé tous les sens autres que
la vue pour compenser l'aveuglement

ParaMag - n°335 - Avril 2015

Table des matières de la publication ParaMag - n°335 - Avril 2015