ParaMag - n°319 - Décembre 2013 - 21

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LE STATUT SOCIAL DU DT
Lors de son assemblée générale du 26 octobre, la FFP a proposé
une nouvelle « Charte des écoles » pour l'agrément-école,
comprenant huit pages de droits et obligations et huit pages
d'annexes techniques.
Bien que composée essentiellement d'une reprise modernisée
d'éléments de l'ancienne charte et d'une compilation de règles
techniques éparses, elle a suscité des réticences qui se sont
manifestées par des votes « contre » et surtout par un nombre
significatif d'abstentions.

Les discussions préalables au vote ont démontré que l'inquiétude des
votants portait sur les conséquences d'une seule phrase des annexes
relative au statut social du DT (directeur technique), à savoir :
« Le cumul de la fonction de DT d'une structure école avec le statut
de travailleur indépendant sur cette structure est exclu ».
Si certains y ont vu une volonté d'abattre les indépendants, la
plupart ont cherché la cause d'une telle restriction, exprimant leur
crainte de ne plus trouver assez de candidats au poste de DT.
Foin de manigances ! Cette restriction provient du droit du travail,
dont certains semblent découvrir les contraintes au grand dam
de ceux qui préféraient n'en rien connaitre ou paraitre n'en rien
connaitre.
Elle trouve son origine dans les dispositions de l'article L.120-3 du
Code du travail concernant les personnes physiques ou morales
inscrites au registre du commerce, au répertoire des métiers
ou auprès des URSSAF. Ses deux dispositions essentielles sont
les suivantes :
« Les personnes physiques immatriculées..., ainsi que les
dirigeants des personnes morales immatriculées... et leurs salariés
sont présumés ne pas être liés avec le donneur d'ouvrage par un
contrat de travail dans l'exécution de leur activité. »

« Toutefois l'existence d'un contrat de travail peut être établi
lorsque les personnes citées... fournissent....des prestations à un
donneur d'ouvrage dans des conditions qui les placent dans un
lien de subordination juridique permanente à l'égard de celui-ci. »
La règle est claire : il n'y a pas de contrat de travail entre un
travailleur indépendant et l'école de parachutisme sauf s'il exerce
dans un lien de subordination.

Concernant le DT, la seule question qui vaille est donc la suivante :
travaille-t-il sous l'autorité et le contrôle du président, du gérant ou
même d'un directeur général pouvant lui donner des directives et le
sanctionner (y compris en mettant fin à son travail) ?

La Charte des écoles décrit les tâches du DT. Il est chargé « de la
sécurité, de l'organisation des séances de sauts, du suivi des
progressions, de la délivrance des brevets fédéraux, des
qualifications école, des mises en formation de moniteurs, du
respect des réglementations ».
S'il dispose d'une indépendance technique incontestable, le DT ne
dispose cependant pas d'une liberté d'action qui l'exonérerait, pour
reprendre des critères jurisprudentiels, « de se soumettre à un
règlement, à des horaires et aux instructions de la direction ». Il
assure la direction technique sous couvert du dirigeant qui assure
la direction dans toutes ses composantes.
Le travail de DT s'inscrit, par son lien de subordination, dans une
relation caractéristique d'un contrat de travail. L'absence de contrat
de travail peut entrainer une requalification, notamment en cas
d'accident du travail ou de licenciement, et /ou des poursuites du
dirigeant pour le délit de dissimulation d'emploi salarié (3 ans
d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende).
En tant que fédération délégataire de puissance publique sous
tutelle de l'Etat (articles L.111-11 et L.131-14 du Code du Sport), à
ce titre partenaire de l'Etat dans la lutte contre le travail dissimulé,
la FFP est légitime à insérer dans sa Charte des écoles des
stipulations conformes au droit du travail.
Crier haro sur la FFP serait une erreur ou un parti-pris car c'est au
droit du travail que les écoles vont devoir s'adapter, non à la
réglementation fédérale.
Puisque le DT n'est pas un travailleur indépendant selon le droit du
travail, et ne peut pas l'être selon la Charte des écoles qui met fin à
une tolérance coupable, deux statuts sociaux restent a priori
envisageables : le salariat ou le bénévolat.
Si les écoles ouvertes à temps plein peuvent salarier le DT en
contrat à durée indéterminée (CDI), les écoles ouvertes à temps
partiel ne peuvent financièrement se le permettre. Ni le contrat à
durée déterminée (CDD) qui concerne un remplacement ou un
surcroit de travail momentané, ni le contrat saisonnier qui ne peut
pas concerner la totalité de la saison, ne sont envisageables.
Une solution existe depuis qu'un avenant du 5 décembre 2012 a
introduit le « contrat de travail intermittent à durée indéterminée »
dans la Convention Collective Nationale du Sport de 7 juillet 2005
dans les termes suivants :

« Le contrat de travail intermittent est un contrat de travail à durée
indéterminée, conclu sur une période de 36 semaines
contractuelles maximum par période de 12 mois (jusqu'à 42
semaines avec l'accord du salarié), afin de pourvoir à des postes
permanents qui, par nature, comportent une alternance, régulière
ou non, de périodes travaillées et de périodes non travaillées. Il ne
s'agit en aucun cas d'un travail à temps partiel ».
Destiné à pourvoir « tous emplois dans les établissements dont la
période de fermeture est supérieure à la durée légales des congés
payés », ce CDI intermittent est adapté pour un emploi de DT dans
une école ouverte à temps partiel.
Et le bénévolat ? Est-il une autre solution ? A suivre dans une
prochaine chronique. ■

21
Décembre13:319
paramag.fr

Le lien de subordination est en effet l'élément essentiel qui
caractérise le contrat de travail. Il est défini par la Cour de
Cassation de la manière suivante, la volonté des partis ne pouvant
y faire échec, seules comptant les conditions d'accomplissement
du travail :
« Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un
travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner
des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de
sanctionner les manquements de son subordonné. »

Par
Yves-Marie
Guillaud
http://www.paramag.fr
ParaMag - n°319 - Décembre 2013

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