REFLETS MAGAZINE - Revue d'information et de réflexion économique - n°95 - 13

Frank Gentin >E81

Président du tribunal de
commerce de Paris
Frank Gentin a démarré sa carrière
chez Bouygues à Riyadh. En 1983,
il rentre en France pour intégrer le
cabinet Arthur Andersen Consulting,
où il officie jusqu’en 1986, date à
laquelle il co-fonde son propre
cabinet, Bonneval, Gentin et
Associés. En 1988, il rejoint la
société Bernis. Il en prend la
direction à partir de 1990 et la
développe : sous son égide,
l’entreprise est devenue le groupe
Bernis Investissement. En 2003, il
ajoute une corde à son arc en se
faisant élire juge au tribunal de
commerce de Paris. Il est nommé
président en janvier 2012.

erreur que de renoncer au système actuel. Tout
d’abord, la qualité du recrutement s’en ressentirait. Aujourd’hui, les décisions sont prises
collégialement, par un nombre impair de juges
qui délibèrent ensemble. Or, les commerçants
éprouvent plus de facilité à débattre avec leurs
pairs : ils peuvent s’identifier à eux, ils partagent la même expertise. Devoir s’en remettre
à un magistrat professionnel pour trancher
serait dissuasif. Et puis, les juges consulaires
prêtent le même serment que les magistrats
professionnels et peuvent être l’objet de procédures disciplinaires : leur impartialité et leur
indépendance ne me paraissent pas devoir être
mises en doute. Enfin, le rapport qualité-prix
de la justice commerciale est très favorable à
la formule actuelle.
Cette institution a été créée par Michel de
L’Hospital en 1563 et elle a été renforcée par
Colbert. Depuis quatre siècles et demi, elle a
survécu à tous les changements de régime.
Cela donne une certaine légitimité… !

RM. Depuis 2003, vous exercez donc en
tant que juge consulaire. Quel a été le
champ de vos responsabilités ?
F. Gentin. J’ai rempli plusieurs types de missions au sein de la juridiction.
J’ai commencé comme juge du contentieux :
cela consiste à entendre les parties qui s’opposent dans un litige, à préparer un projet de
jugement qui est soumis au délibéré de ses

pairs. C’est au cours de ce délibéré qu’on
apprend beaucoup.
J’ai ensuite été juge dans les chambres de traitement des difficultés des entreprises : je me
suis occupé de liquidations et de redressements judiciaires. Puis j’ai été affecté à la seule
chambre spécialisée dans les procédures de
sauvegarde en France : je suis intervenu dans
des dossiers très intéressants, avec de véritables enjeux financiers et sociaux.
J’ai aussi été délégué aux référés ou encore à la
prévention, ce qui consiste à chercher à anticiper les difficultés des entreprises. En vertu
d’un principe : plus on anticipe un problème,
plus on a de chances de le régler. C’est la dernière mission assignée par le législateur au juge
du commerce. On reçoit le dirigeant et on
analyse sa situation avec lui...

RM. Depuis janvier 2012, vous occupez
le poste de président du tribunal de
commerce de Paris. Comment avez-vous
accédé à cette fonction ?
F. Gentin. Le président d’un tribunal de commerce est élu par ses pairs, parmi les juges en
activité ayant plus de six ans d’expérience, pour
un mandat de quatre ans. L’élection compte
trois tours, les deux premiers à la majorité
absolue et le troisième à la majorité relative.
J’ai été élu au deuxième tour au terme d’une
vraie campagne électorale puisque nous étions
six candidats sur la ligne de départ.

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mai/juin 2012

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