ESCP Europe Alumni Magazine - n°148 - Mai/Juin 2013 - 65

éCole

Par le Professeur Didier MARTEAU, Professeur à ESCP Europe,
Membre du Conseil scientifique de l’ACP

Crise de l’euro :
les craintes sontelles dissipées ?
Le thème de Start@Europe 2013, « l’Union bancaire », sera abordé à
travers le cas remis aux étudiants pour l’exercice de négociation et
l’organisation de conférences-débats. Didier Marteau, intervenant
durant le séminaire, s’interroge en introduction sur le regard porté
par les marchés sur la crise de l’euro.
Les marchés financiers ont une vertu que n’ont
pas les économistes. En intégrant de manière
instantanée l’information disponible, les prix cotés
renvoient gratuitement et en temps réel une représentation du monde et de son évolution future. Une
représentation certes fragile et volatile, qui est celle
des opérateurs de marché à un instant donné, dont
l’opinion repose sur des modèles implicites souvent
frustes, à coup sûr moins développés que ceux utilisés par les macro-économistes, mais une représentation issue de la confrontation de l’ensemble
des intelligences et analyses des acteurs opérant
sur le marché. Que nous disent aujourd’hui les
« marchés » sur la crise de l’euro, la dette publique
européenne et la solidité du système bancaire ?
Le risque d’éclatement de la zone euro s’est
largement dissipé, mais n’a pas totalement
disparu
De manière discrète, l’Allemagne emprunte depuis
plusieurs mois à un taux d’intérêt négatif, les Bons
du Trésor remboursés 100 dans 3 mois étant
cotés sur le marché à un prix supérieur à 100.
Quelle peut être la motivation des investisseurs,
qui pourraient obtenir une rémunération positive,
sur la même maturité, en prêtant par exemple à
l’Espagne ou l’Italie ? La première réponse est bien
sûr le risque relatif de défaut, mais personne ne
croit raisonnablement à l’hypothèse d’un défaut de
paiement des deux derniers États sur un horizon
de 3 mois. La seconde explication est celle d’une
préférence « irrationnelle » pour les titres du Trésor
allemand, dont la détention est si recherchée
qu’elle est associée à une rémunération négative.
On retrouve ici le « convenience yield » introduit
par Keynes, rémunération implicite associée à la

détention d’un actif stratégique (pétrole par exemple). Reste une troisième explication. Dans l’esprit
des investisseurs, le risque d’éclatement de la zone
euro n’a pas totalement disparu, et un « euro du
nord » n’a pas la même valeur qu’un « euro du sud ».
Le différentiel de taux d’intérêt rémunère le risque
de variation du cours de change entre les deux
« euros », le cadre théorique de cette analyse étant
la parité des taux d’intérêt du même Keynes, pour
lequel le rendement de tout placement, somme du
taux d’intérêt et de la variation du cours de change,
doit être identique entre toutes les monnaies. Le
risque d’éclatement de la zone euro afin de restaurer la compétitivité-prix des nations aujourd’hui en
difficulté n’a pas totalement disparu de l’esprit des
opérateurs, même si le différentiel de taux à court
terme est devenu faible et fragilise l’hypothèse.

Didier Marteau

Le risque bancaire s’est largement dissipé,
mais n’a pas totalement disparu
Des taux d’intérêt négatifs sur les titres du Trésor
allemand expriment aussi, de la part des investisseurs, une défiance résiduelle à l’égard du système bancaire, qui offre une rémunération en euros
nulle ou positive sur les dépôts. Un euro du Trésor
allemand vaut plus qu’un euro détenu dans une
banque allemande. Peut-être en raison de la
poche d’incertitude qui entoure toujours la valorisation des produits dérivés en « mark to model », représentant encore environ 85 % de la
valorisation totale des produits dérivés. Derrière
l’illusion d’une monnaie unique, se cache en
réalité encore aujourd’hui une multitude d’euros,
dont l’agrégation risque d’être un processus
long, auquel la prochaine création de l’Union
bancaire européenne apportera sa pierre.
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ESCP Europe Magazine N° 148 - Mai/Juin 2013 -

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Table des matières de la publication ESCP Europe Alumni Magazine - n°148 - Mai/Juin 2013

Couverture
Zapping
Sommaire
BUSINESS
Personnalités du mois Gilles BOGAERT (91) : Acteur de la performance
Focus
Sur tous les fronts
Au coeur de la création de valeur
Soigner sa communication
Transformer la fonction
Piloter la performance
The navigator
Efficience and performance
Chef de choeur
Des défis à revendre
De l’audace, toujours de l’audace
Itinéraires
Le goût de l’aventure
Créer sa « boutique »
Entretiens
Promo 78 : 35 ans après
Promo 88 : 25 ans après
Tourisme & loisirs
Agro-alimentaire
Banque/finance
Développement durable
Innovation
BTP
Avocat
NEWS
Vie du réseau
Alain PROST (83), Président de Maison Lejaby
Nominations
Groupe Automobile : La stratégie de Renault en Chine
La 57 pleure…
Groupe RH : du système D au système CO
Carnet
London Gala
Agenda
À lire
Carrière Le DAF du 21ème siècle
Voyages Maroc-Martinique à la rame
CAMPUS
École
Start@Europe 2013
Crise de l’euro : les craintes sont-elles dissipées ?
Le MS Finance fête ses 25 ans
Fondation 2013 : une action renforcée !
Vie étudiante
Au grand galop !
Noisy week-end

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