ESCP Europe Alumni Magazine - n°147 - Mars/Avril 2013 - 44

La Nature se prépare
pour le premier matin
du monde.

Tous orientent leurs
regards vers les
chutes.

à côté du sentier. Je ne peux pas m’arrêter ou faire
demi-tour : peut-être trouveraient-ils cela suspect ?
Je serre les fesses à mort (soyez chic : serrez avec
moi). Je ne les regarde surtout pas, ou alors à peine
du coin de l’œil, en biais (en anglais bien des verbes désignent la vision latérale)...
Ouf, je suis passé, je ne devais pas avoir une odeur
offensante malgré une certaine suée. Je poursuis
mon petit bonhomme de chemin. Il fait jour maintenant. Le vacarme formidable des chutes s’amplifie
encore : je ne suis plus bien loin.
M’y voici. Je débouche dans un univers d’eau et de
bruit, dans un monde magique. Et je ne suis pas
seul à ressentir cet émoi, cette majesté naturelle
des lieux. Sur ma gauche, mais encore plus sur ma
droite, tous les animaux (non prédateurs, mais allez
donc savoir…) se sont donnés un rendez-vous matinal : buffles, kudus (grandes antilopes), bubales,
impalas, dikdiks,… Aucun ne s’agite, aucun n’est
gêné par la présence proche d’espèces différentes. La cataracte monstrueuse, en se fracassant en

contrebas, explose en continu en pulvérisant l’eau
que l’air remué propulse jusqu’à plus d’un kilomètre de haut. Résultat : il pleuvote sur les museaux
et les corps, mais les animaux, comme statufiés, ne
s’en soucient nullement. Sauf les singes (la plupart
assez désordonnés), tous ces animaux quadrupèdes se tiennent dans une attitude fixe, digne,
presque hiératique. Et tous orientent leur regard
vers les chutes ; ils les contemplent intensément.
Le monde minéral, le monde aquatique, le monde
végétal, le monde animal : il semble que la Nature,
que la Création toute entière se préparent pour
le premier matin du monde. Serait-il possible que
chaque jour se renouvelle cette cérémonie d’allégeance ? C’est plus que probable, car la puissance, la force d’attraction qu’exerce cet endroit
prodigieux semblent tout à fait de nature à inféoder
tout témoin à l’observance de ce rite matinal. Moimême je ressens très vivement la force de cette
vision grandiose.
Mais soudain, là, devant moi, dans les chutes, làbas, ainsi que je l’avais imaginé et espéré, voici
une flamme orange qui grandit et se met à danser
avec frénésie au travers du gigantesque mur d’eau
qui s’écroule : c’est le soleil levé qui commence sa
lente et éblouissante ascension « dans » l’eau puis
au-dessus du fleuve. Les animaux restent figés :
honorent-ils le dieu Soleil ? Saluent-ils la puissance
et la lumière ? Le spectacle, honnêtement, est tout
simplement sublime,... et je suis, semble-t-il, le seul
humain à m’en régaler... au moins ce jour-là...
Discrètement, sans mouvement brusque, j’ai pris
en main ma caméra puis mon appareil photo. Pas
si simple, car il ne faut pas qu’ils soient trempés,
surtout les objectifs, par ces projections humides...
quand bien même cette journée ne connaitra-t-elle
qu’un magnifique ensoleillement estival... Voilà encore des vues et un film qu’il me faudra retrouver
dans le fatras de mes archives...
Cette somptueuse mise en scène de la nature vous
instille dans les veines un sentiment de vraie modestie et -j’ose l’écrire- de gratitude quand on est
en vie pour pouvoir l’apprécier. Bien que fasciné,
je quitte malgré tout ma position pour contourner
le « gouffre du Diable »(*) et remonter un peu en
amont des chutes.

(*) Les Victoria Falls, à la rencontre de quatre états,
Rhodésie (Zimbabwe), Zambie, South West Africa (Namibie) et Botswana, sur le fleuve austral Zambèze, sont
une chute avec faille unique, rectiligne, de 1 700 mètres
de long, et de 95 à 108 mètres de haut. En juin 1972,
suite aux pluies diluviennes sur l’Angola en avril/mai, le
volume d’eau était alors comparé (par les ingénieurs hydrauliciens de Kariba) à celui de l’Amazone ; un mur d’eau
de 6 mètres (se déplaçant à près de 70 km/h) recouvrait tout le bord de faille avant de s’écrouler avec fracas.
Devil’s Cataract (le gouffre du diable) est cette partie basse
des chutes où l’eau « s’effondre » avec la plus grande furie,
en causant une érosion intense, due aux rocs, pierres et
graviers entraînés.

- ESCP Europe Magazine N° 147 - Mars/Avril 2013

Table des matières de la publication ESCP Europe Alumni Magazine - n°147 - Mars/Avril 2013

Couverture
Zapping
Sommaire
BUSINESS
Personnalités du mois Didier CORDERO (EEMBA 96) : Donner de l’énergie
Focus
- The global energy map
- At the edge of a new age
- Le futur énergétique
- Sustainable cities
- La performance énergétique
- Offshore wind farms
- A change of attitude
- Indian challenges
Itinéraires
- Joaillerie sur mesure
- Tous les chemins mènent à l’énergie
Entretiens Agro-alimentaire
NEWS
Vie du réseau
- Fany PECHIODAT (01 BE), Fondatrice de My Little Paris
- Nominations
- Bon anniversaire !
- Les fauves de la 57
- Carnet
- Passation de relais
- Agenda
À lire
Carrière Énergie managériale : ressource vitale ?
Voyages Chutes Victoria : le premier matin du monde
CAMPUS
École Entering a new era of the energy industry
Fondation Merci pour votre soutien !
Vie étudiante
- cHeer uP ! souffle ses 10 bougies
- Nous voulons l’Europe
- Sur la ligne de départ
- Un avenir où vous allez bien tourner !
- Faire renaître le théâtre

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