ESCP Europe Alumni Magazine - n°131 - Juillet 2010 - 36

Vie du réseau
ESCP RUNNING

Sol invictus !
Par Laurent CHOURAQUI [Exe MBA 05], Membre du bureau ESCP Running et co-fondateur de l’opération 5 marathons sur 5 campus
n ce 11 avril, il flotte sur la capitale un parfum de bien-être. Longtemps, nous avons dû composer avec les caprices d’un hiver rude et si long. Il a rendu l’entraînement parfois détestable. Mais, en ce jour où nous abordons la dernière étape de notre périple, le soleil s’est enfin décidé. Ils sont venus, ils sont tous (ou presque) là… Près de 60 coureurs font dos à la Chambre de Commerce de Paris et face aux appareils photos. Il faut dire que nous avons fière allure dans notre toute dernière tunique aux couleurs de ESCP Europe et d’Autour des Williams. 8h25… La photo de famille est faite. La plupart des coureurs sont déjà partis rejoindre leur sas de départ. Nous sommes encore une dizaine, tendus comme des arcs autant qu’émus, à traîner sur le pavé, comme si nous voulions figer le temps avant ce dernier départ. Soudain, un journaliste hirsute nous apostrophe, il est de France 3, et promis, juré, craché, nous serons de l’édition nationale du 13h dominical. La gloire pour nous et la cause des Williams que Christophe défend avec la verve professorale qui le caractérise devant le micro du journaliste.

Voilà un drôle d’oiseau capable de couvrir la distance en moins de 2h30, et qui pour la circonstance est chargé d’accompagner les coureurs au rythme qu’impose l’objectif des 3h. Pour ce qui me concerne, ce sera mission 1h29 à mi parcours, avec de la réserve, car si le marathon fait 42,195 km, il reste une course d’approche jusqu’au 30 km.

Cinq ans que

j’attends ce grand moment...

Du courage...

Arrivés sur les Champs notre petit groupe répond à l’appel de Christian pour former un cercle. On baisse la tête, on se tient par les épaules comme pour invoquer les dieux de la course autant que pour exorciser les démons de cette angoisse qui tend nos muscles et noue nos gorges. Le cri de guerre est lancé… On s’enlace, on s’embrasse. On se souhaite bon courage, une toute dernière fois au bout de 5 ans, de 5 marathons et des 5 villes européennes parcourues, Madrid, Berlin, Turin, Londres, et dans quelques heures, la ville lumière, notre ville : Paris. Chacun est désormais dans sa course. « Yes you can ! » me disje. Et pourtant... Plus de 14 km/h de vitesse moyenne. Voilà qui me semble soudain irréel voire vertigineux. Alors, au pistolet, je me cale sur celui qu’on appelle le meneur d’allure.

J’avale la rue de Rivoli avec facilité et désinvolture, mais tout irait au mieux si je n’avais pas cette furieuse envie de soulager cette vessie qui n’en fait qu’à sa tête ! Mais, il est trop tôt, et je risque de me faire happer par le groupe des 3h15 qui n’est pas encore suffisamment éloigné. Par chance, les abords du bois de Vincennes après le 10ème km offrent des recoins idéaux pour satisfaire ce type de pression malfaisante. Arrivé à la porte de Charenton, je suis à une 100aine de mètres devant mon meneur, toujours bon à prendre pour la confiance, d’autant que je franchis la 1ère partie du parcours en 1h29 et 30 sec pile-poil. La pente est alors légèrement descendante, et il me semble opportun d’en profiter pour pousser une très légère accélération, sorte de hors d’œuvre digeste avant le plat de résistance des montées qui doivent survenir après le 28ème km. Les quais se dressent alors devant nous. Désormais c’est droit devant que mon regard est tourné. Point de mire : les tunnels où s’enchaînent montées et descentes, comme dans les montagnes russes. Le cauchemar du coureur après plus de 30 km… À l’approche du Trocadéro, 1ères alertes. Le souffle est plus court et les jambes ankylosées par l’effort sont lourdes. Soudain, j’aperçois le meneur me dépasser sur mon flanc droit. Les 3h sont en train de filer sous mon nez. Il reste moins de 10 km. Réunion de crise avec moi-même. D’un côté, je peux accélérer et tenter un coup de poker pour tenir le plus longtemps possible en prenant un risque d’asphyxie avant l’arrivée. De l’autre, je peux tenter de réduire mon allure pour finir à environ 5 min de mon objectif initial. 3h05, c’est un peu le plan B auquel je réfléchis depuis plusieurs jours au nombre d’autres possibles puisqu’il s’agit de la barre

Un entraînement et une stratégie

ESCP Europe Magazine N° 131 - Juillet 2010

Table des matières de la publication ESCP Europe Alumni Magazine - n°131 - Juillet 2010

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