ESCP Europe Alumni Magazine - n°130 - Mai 2010 - 15

Business
Dompteur de dons
Pierre BIRAMBEAU [64]

D.R.

a France occupe un rang moyen en Europe pour le don et se classe loin derrière l’Angleterre, le Canada ou les États-Unis. En 2004, Pierre a contribué à créer l’ADEMA (Association pour le Développement du Management Associatif). Si les associations font déjà un travail formidable, elles pourraient aller beaucoup plus loin. Comment ? En professionnalisant le monde associatif et en sensibilisant le public. Pour avoir été cofondateur du Téléthon, que pensez-vous de la polémique lancée par Pierre Bergé ? Je ressens un profond sentiment d’injustice. Il accuse le Téléthon « d’accaparer la générosité des Français ». Rien n’est plus faux. Le Téléthon accueille seulement 3 % des sommes données par les Français chaque année. Aucune association n’a donc « le monopole du cœur ». Tous les combats pour réduire les maladies sont justes. Mais, ils doivent devenir plus professionnels. Il est utile de préciser que le Téléthon travaille dans le cadre de 6 000 maladies…

associatif s’entoure de plus en plus de spécialistes et d’experts au service des bénévoles pour les rendre plus compétents. L’image poussiéreuse du bénévole « pousse-cartons » non qualifié appartient au passé. Même si de nombreux défis restent à relever. Malgré la retraite, on a l’impression que vous vivez toujours à cent à l’heure… Après le Téléthon, j’ai éprouvé la nécessité psychologique, presque physique, de ne pas arrêter brutalement. C’est comme si j’avais eu peur de mourir si je ne faisais pas ça. D’instinct, j’ai pensé à recréer le même type de grand événement. Il m’a fallu du temps pour évoluer. Aujourd’hui, je travaille encore 40 heures par semaine. Et je me demande parfois si c’est justifié. Quels avantages y a t-il à être un senior actif ? Pouvoir continuer à travailler dans le non profit, avec un regard plus serein et moins de contraintes matérielles. J’apprécie de ne plus être dans une structure professionnelle lourde, soumise à beaucoup de pression. Travailler dans une association oblige à rester curieux, et à créer ou développer des réseaux. Quel est votre principal trait de caractère ? L’empathie, l’attention aux autres mais aussi l’anxiété. De quoi avez-vous peur ? De tout. Votre principal truc contre le stress ? Me convaincre que le pire n’est pas toujours sûr. Le bonheur parfait selon vous ? Entreprendre et être compris. Votre pêché mignon ? Contempler une belle femme...! Quel est le prochain rêve que vous voudriez réaliser ? Rajeunir… Petit, que vouliez-vous faire ? Dompteur de lions.

Travailler

dans le non profit permet de continuer à travailler avec un regard plus serein et moins de contraintes matérielles.

En général, la multiplicité des actions de marketing direct tend plutôt à développer un marché qu’à le tarir. Est-ce le cas pour le Téléthon ? Bien sûr ! Il est indéniable que des associations fortes génèrent un effet d’entraînement, et non de concurrence. Cela crée des habitudes. Ce travail fait émerger de nouvelles races de donateurs. Il exerce une influence positive sur l’ensemble des filières de recherche. Les chercheurs ont une carrière globale. Ils deviennent plus efficaces, avec désormais pour mission de « guérir » et non plus seulement de « chercher et publier ». Aujourd’hui, votre nouveau cheval de bataille c’est l’ADEMA. Vous cherchez à faire évoluer la compétence des associations en les aidant à s’inspirer des best practices ? Tout à fait. C’est le rôle de l’ADEMA, en coopération avec l’École des Mines de Paris, d’aider les associations à être plus efficaces. Beaucoup de gens envisagent une association comme un lieu de détente. Ils ignorent que gérer des bénévoles s’avère beaucoup plus difficile que de gérer des salariés. Le terme de « bénévolat de compétences » devient à la mode. Il traduit une réalité : le monde

Propos recueillis par Guy MAYNART (83) 15

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