ESCP Europe Alumni Magazine - n°129 - Mars 2010 - 45

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profondeur, du souffle. Parodiant le chanteur Renaud (vous savez : « c’est la mer qui prend l’homme…»), je dirais que ce ne sont pas les hommes qui font des transats, ce sont les transats, toutes les grandes traversées, qui font -ou qui défont- les marins. Une course comme celle-là, c’est d’abord un grand condensé d’émotions. Les mots qui me viennent à l’esprit sont : intensité, humilité, esprit d’équipe, solidarité, liberté. C’est une suite de joies simples, de problèmes à résoudre, de ressentis esthétiques, de souffrances, de petits et grands malheurs, de doutes, de bouffées d’amitié et d’émerveillements.

D.R.

Tout a commencé quand ?

Le grand départ.

Difficile à dire : en janvier 2009 quand j’ai commencé la préparation physique ? En juin au moment de la mise à l’eau du bateau ? En juillet, au moment de la première course des Sables d’Olonne à Horta, aux Açores, qui servait de qualification pour la Route du Chocolat ? Une transat en course, j’y pensais depuis un bon moment. En tous cas mi-octobre, lorsque le bateau a été amarré avec les autres dans l’écluse du port de Saint-Nazaire, j’ai compris un peu pourquoi tous les participants au Vendée Globe disent qu’être au départ, c’est déjà une victoire !

en forme. J’ai beaucoup travaillé en particulier la « force explosive » !

Le week-end du départ ?

Comment vous êtes-vous préparé ?

Une ambiance fantastique à Nantes et à SaintNazaire. La liste des choses à faire qui n’en finit pas de s’allonger avant de commencer à se raccourcir. Finalement, la veille du départ, nous avions réussi à faire presque tout ce que nous voulions. Et puis le jour du départ, grand bonheur : mélange subtil de tensions, d’appréhension, d’excitation et de stress positif qui fait qu’on se sent fort, prêt à en découdre et qu’on a hâte d’être au large.

Soigneusement, le plus méticuleusement possible. Comme on se prépare à une grosse acquisition ou à une introduction en bourse : je me suis surtout concentré sur l’acquisition de compétences que je n’avais pas, ou que je devais mettre à jour. Stage de secourisme : apprentissage de techniques médicales en situation d’isolement. Stage de sécurité et survie en mer. Longues heures passées à apprivoiser les outils informatiques du bord dont beaucoup étaient nouveaux pour moi. Deux stages de météo, dont un spécialement conçu pour nous… Des entraînements sur l’eau avec un coach avec qui nous avons beaucoup travaillé les manœuvres et la communication avec mon co-skipper… Et bien sûr sans oublier la préparation physique. À 50 ans, il fallait que je me mette sérieusement
D.R.

Le golfe de Gascogne… dès le départ vous rencontrez une suite de dépressions ?

Oui. Nous suivions l’évolution de la météo depuis plusieurs jours déjà. Le briefing météo le matin du départ nous avait confirmé nos inquiétudes : nous savions que nous allions rencontrer des conditions difficiles. Dès la deuxième nuit, nous avons eu 35 à 40 nœuds de vent, et une mer très dure, avec plus de 7 ou 8 mètres de creux, surtout vers le cap Finistère et au large du Portugal. En plus, c’est une zone avec beaucoup de cargos. C’était bien plus dur que ce que nous avions imaginé. Peu après le départ, il y avait déjà plusieurs abandons. Aprés deux jours de mal de mer sévère et plusieurs jours de grosse mer, nous étions réellement épuisés physiquement. Cela a duré plus de 10 jours d’affilée. Nous n’avons pu commencer à enlever nos cirés trempés qu’une fois arrivés déjà bien au sud des Açores.

Et après ? Le bonheur de trouver les alizés ?

32 jours de mer plus tard...

Oui mais toujours avec des conditions instables et difficiles qui ont gâché un peu notre plaisir de naviguer enfin dans des eaux plus chaudes. Quelques jours avant les Antilles, en particulier, nous avons rencontré d’énormes systèmes orageux, avec un vent très instable en force et en direction, et des grains impressionnants au milieu desquels nous n’en menions pas large, surESCP Europe Magazine N° 129 - Mars 2010 45

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