ESCP Europe Alumni Magazine - n°127 - Novembre 2009 - 9

Business Cette situation ne fragilise t-elle pas le groupe en limitant son développement par manque de moyens financiers cumulé à un endettement significatif ? Aujourd’hui le groupe est totalement à l’abri d’une OPA, le capital étant détenu dans sa globalité par la famille. Sa holding, la Financière Courtin, s’est endettée à l’origine de la transaction, à hauteur de 890 millions d’€, et a pris des engagements bancaires qui nécessitent que son actif, le groupe Clarins, lui apporte suffisamment de dividendes pour rembourser les prêts. Le chemin est donc un peu ardu mais à moyen terme, je qualifierai cette décision de très positive. Être un groupe familial avec des convictions et une vision incite au respect, et le plus souvent, ces entreprises ont de bien meilleures performances dans la durée. Je pense enfin que la contrainte crée le talent et, comme je le répète à mes équipes, pousse chacun des collaborateurs à être encore plus exigeant. Mon objectif ultime est de trouver le bon équilibre entre prudence et audace, les deux exigences du métier du luxe. Comment procédez-vous pour atteindre cet équilibre ? Pouvez-vous illustrer vos propos ? Nous avons dû faire des choix stratégiques d’investissement. Chez Mugler, nous n’aurons jamais investi autant en publicité qu’au cours de ces 12 derniers mois, profitant de nos bons résultats ; chez Azzaro, nous avons signé un contrat avec l’égérie Enrique Iglesias pour renouveler la communication ; actuellement, nous développons le projet Swarovski et redéployons la marque de mode Mugler. Et ce ne sont que quelques exemples. Ces choix stratégiques nous coûtent de l’argent, et en conséquence, nous sommes très exigeants dans la gestion quotidienne, en limitant les dépenses non productives. Ressentez-vous une certaine frilosité de la part des banques ? Non, pas précisément. Nos relations sont bonnes et nous faisons preuve réciproquement de compréhension et de bonne intelligence. En fait, il s’agit d’un pool bancaire très attentif aux performances de notre groupe qui sont aussi appréciées par nos banquiers à la lumière de la crise que traverse le secteur du luxe. La gouvernance de l’entreprise a t-elle évolué avec la privatisation ? Elle a été modifiée. Le Conseil de Surveillance représente les intérêts de la famille avec Christian Courtin comme Président. Le Directoire est présidé par Philip Shearer, un ancien dirigeant de chez Lauder, de culture très internationale et aujourd’hui mon patron. La structure de gouvernance du groupe est très saine. Quel est le degré d’indépendance de Thierry Mugler Parfums par rapport à Clarins ? Quelles sont vos responsabilités ? Les métiers soins et parfums sont très différents. Thierry Mugler Parfums est une filiale et Azzaro Parfums, une autre. La fusion de ces deux filiales au sein de la nouvelle entité : Clarins Fragrance Group (CFG), créée en 2008, est aujourd’hui réalisée. Cette division regroupe nos 5 marques de parfums : Thierry Mugler, Azzaro, Porsche Design, Swarovski et David Yurman (joaillier américain dont la marque n’est pas commercialisée en Europe). Je suis aujourd’hui Président de l’ensemble de ce portefeuille de marques avec pour tâche de trouver des synergies entre elles et de mieux planifier les investissements marketing, de production et calendriers de lancements pour mieux affronter nos concurrents. CFG fait approximativement 300 millions de CA consolidé, soit environ le tiers du groupe. Elle a une unité de production dédiée à Strasbourg, qui fabrique tous les parfums du groupe ainsi que son service commercial et marketing. En revanche, le laboratoire, la logistique, la gestion financière sont communs avec Clarins. Qui sont vos principaux concurrents ? Comment votre groupe se démarque t-il ? Clarins Fragrance Group se situe dans le top ten mondial de la parfumerie sélective constituée principalement de Procter & Gamble, L’Oréal, Coty. Il faut compter aussi des challengers très présents comme BPI avec la marque Gaultier, Puig (un groupe espagnol qui dirige Paco Rabanne et Nina Ricci), Inter Parfums… Il y a énormément d’acteurs dans le secteur du luxe et la concurrence y est rude. Ce secteur très compétitif est également très international. Notre objectif est de répondre aux exigences spécifiques de chaque marché et, pour se démarquer des autres, nous nous efforçons d’être autant créatifs que gestionnaires en faisant preuve de grande rigueur. L’innovation est un moteur de croissance certain qui fait la différence. Dites-nous quelques mots sur vos marchés. Quelle est la répartition du CA en France et à l’international ? Le groupe fait environ 80 % de son CA à l’international et 20 % en France. Les marchés qui ont le plus souffert sont l’Espagne en raison de la bulle immobilière efforçons d’être aussi créatifs que gestionnaires en faisant preuve de grande rigueur. L’innovation est un moteur de croissance qui fait le différence. « Nous nous » ESCP Europe Magazine N° 127 - Novembre 2009

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