ESCP Europe Alumni Magazine - n°127 - Novembre 2009 - 11

Business Pourquoi avoir choisi Thierry Mugler comme directeur artistique de vos parfums ? Thierry Mugler travaille pour Clarins depuis 1992. C’est un créateur, un visionnaire, avec une forte dimension créative. Créer un parfum exige en effet un cumul de dimensions artistiques. Il faut imaginer l’histoire, d’une femme, d’un homme, d’une rencontre l’imaginaire occupe une large place. La démarche de départ est presque littéraire. Ensuite, la dimension devient sensuelle, sensorielle, puis olfactive. Le « nez » doit penser le « jus » (nom du parfum donné dans le métier) pour élaborer le parfum qui va séduire la clientèle. Il s’agit à cette étape d’écrire une partition comme on écrirait un morceau de musique. Le « nez » fait donc partie de notre petite équipe créative dont Thierry Mugler est l’homme orchestre. C’est lui qui a la vision globale, ce qui explique que les parfums portent son nom. En final, intervient la dimension « design » avec mille possibilités de formes, de matières, de matériaux et enfin il faut traduire tout cela dans une communication grâce à un film, une image qui va exprimer tout l’imaginaire du produit. Naomi Watts a été choisie comme nouvelle égérie car elle représente une communication toujours plus glamour et internationale. Quels sont vos canaux de distribution ? Dans le luxe, la distribution constitue le nerf de la guerre. La rareté implique en effet une sélectivité des canaux. Les parfums Thierry Mugler sont distribués par exemple dans environ 12 000 points de vente dans le monde. 75 % sont des parfumeries, 15 % sont des grands magasins, 8 % du travel retail et 2 % de l’Internet. Je ne pense pas que ce canal évoluera beaucoup dans la mesure où le parfum est un produit plaisir, cadeau, sensoriel. Ce réseau de distribution restera donc minoritaire. Quelles valeurs sont associées à votre marque ? Aujourd’hui les marques reconsidèrent les valeurs fondamentales qu’elles veulent associer à leur nom car la créativité et le prestige ne suffisent plus. Les valeurs éthiques comme le DD font souvent la différence. Christian Courtin est très attaché à ce concept puisque la marque Clarins a toujours eu une dimension « nature » très forte dans sa communication et dans la création de ses produits en privilégiant depuis toujours les ingrédients naturels. Les valeurs de Clarins représentent sa force. Quand on rentre dans le groupe, on y est très vite attaché et on y reste dans la durée. Les notions de respect et de plaisir y tiennent une place particulière. Depuis que l’on est sorti de bourse, on est encore plus maître de notre destin, un vrai plus que chacun apprécie à sa juste valeur. Comment appliquer ces valeurs de DD à un produit de luxe comme un parfum dont le flacon est lourd en raison du poids du verre ? Cela a été un vrai challenge que de rentrer dans une logique d’économie. Lors de la naissance d’Angel, on a décidé de fabriquer des flacons « ressourçables », un concept révolutionnaire à l’époque. La contrainte venait du fait que le flacon est compliqué et cher à fabriquer puisqu’il s’agit d’une étoile en verre taillé. Une étoile étant éternelle, nous incitons nos clientes, plutôt que de jeter leurs flacons, de les rapporter en boutiques pour les re-remplir, ils deviennent un peu comme un talisman pour elles. Ce sont ainsi des millions et des millions de flacons qui sont économisés. Des bilans carbone relatifs à cette économie du ressourçage ont été entrepris et notre marque est exemplaire en la matière, dans le secteur de la parfumerie. Comment avez-vous géré les RH en ce temps de crise ? Recrutez-vous et quels profils ? Nous avons restructuré nos équipes lors de la création de CFG en les rajeunissant. Avec la crise, nous avons géré nos effectifs au plus juste. Par exemple, les CDD au sein de notre usine de Strasbourg n’ont pas été renouvelés pour ajuster la production à la demande. Les personnes proches de l’âge de la retraite n’ont pas forcément été remplacées. Nous avons aussi fait beaucoup de promotion interne et fait évoluer certains métiers comme celui des représentants, ou dans l’achat média, avec Internet, qui nécessite une expertise de plus en plus pointue. En matière de recrutement, nous sommes prudents et nous nous adaptons à la situation. Ainsi, pour la marque Swarovski dont nous préparons le lancement, nous allons Questionnaire de Proust : Avez-vous un défaut que vous aimeriez corriger ? L’exigence, tant vis-à-vis de moi-même que des autres. Quelle est la plus grande qualité que vous appréciez chez les autres ? La sagesse. Quels sont vos centres d’intérêt autres que le travail ? L’art contemporain, l’architecture, le design, la nature sauvage et… la paresse. Quel message écririezvous sur une page blanche à l’adresse des jeunes d’aujourd’hui ? La vie est encore plus belle que vous ne le pensez ! D.R. ESCP Europe Magazine N° 127 - Novembre 2009

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