ESCP-EAP Mag - n°123 - Mars 2009 - 17

Business SOS pour la presse Par Arnaud de PUYFONTAINE [88] D.R. L a presse écrite va mal. Sans vouloir jouer les Cassandre ni être alarmiste, il est urgent pour elle de se ré-inventer si elle veut survivre. Mise à plat de la situation par Arnaud de PUYFONTAINE, ancien Président d’Emap France devenue Mondadori en 2006, et Président du pôle « Processus industriels » aux États généraux de la presse. Les États généraux de la presse écrite, lancés par le président de la République le 2 octobre 2008, interviennent dans un contexte de crise de la presse écrite. Crise financière liée à une baisse structurelle de ses revenus et à des coûts fixes importants. Crise du lectorat liée à de nouveaux modes de consommation des médias. Crise enfin des contenus avec l’introduction des techniques numériques dans les rédactions et accessible à tout internaute. Une crise fatale à la presse écrite ? verses dans la presse et qui finalement ne font qu’illustrer les approches idéologiques qu’elles prétendent dénoncer. Tout au contraire, nous nous sommes attachés à ce que le pragmatisme l’emporte sur les idéologies, que l’intérêt général prime sur les corporatismes. Vouloir aboutir Adapter le modèle économique Comment voir finalement l’avenir de la presse ? Pour Arnaud de PUYFONTAINE, l’avenir de la presse dépend de notre capacité au sursaut, de notre capacité à nous réinventer, de notre capacité à repenser notre modèle économique, bien conscient qu’un journal « ne sera jamais un produit comme un autre », mais aussi convaincu qu’avoir une presse rentable est le plus sûr moyen d’assurer son indépendance et son pluralisme, en un mot sa pérennité. Les problématiques auxquelles se sont attelés les États généraux sont complexes et tiennent tout à la fois à son histoire, aux rigidités structurelles du secteur et à des points de blocage spécifiques à la France, absents chez nos voisins européens. Cette situation n’est donc pas nouvelle. Si le diagnostic est connu et partagé par tous, la nouveauté est plutôt à chercher dans les conditions actuelles du marché qui ont fortement accentué les traits de cette crise, qui sera la dernière parce que celle-ci risque d’être fatale à la presse écrite, du moins s’il s’agit de préserver les grands équilibres du secteur. Dans ces conditions, les États généraux sont-ils la réponse adéquate à cette situation d’urgence ? Certains sceptiques se plairont à dénoncer la production d’un énième rapport, appelée pour l’occasion Livre Vert, et ayant vocation à s’ajouter aux rapports, mémoires, dossiers qui depuis près de 15 ans font assaut de recommandations rarement mises en œuvre. Une différence fondamentale demeure : l’ampleur de la mobilisation et la volonté politique d’aboutir. Pour y parvenir, le dispositif des États généraux, conformément à leur dimension historique, a permis de tenir tribune libre et de permettre à tous les acteurs de l’industrie de faire valoir leur point de vue. J’insiste sur ce point qui a pu faire l’objet de contro- Dans cet esprit, le pôle « processus industriel » dont j’animais les travaux a tenté d’aboutir à une série de recommandations volontaristes, pragmatiques et susceptibles de lever les blocages industriels identifiés en matière de fabrication, financement et distribution, qu’il s’agisse de la vente au numéro, de l’abonnement ou du portage. Ces recommandations ne sacrifient en rien le modèle actuel mais elles tentent d’adapter le modèle économique de la presse au nouvel environnement des médias et de faire évoluer l’ensemble de sa chaîne de valeur. Passer d’une logique d’aide à une logique d’investissement Au terme de 3 mois de travaux, le Livre Vert des recommandations a été remis au Ministre de la Culture le 8 janvier dernier. Avec les arbitrages que le Président de la République a rendu le 23 janvier dernier, nous entrerons dans la dernière phase du processus, la plus importante car les 6 prochains mois seront déterminants pour mettre en œuvre les mesures décidées avant qu’elles ne deviennent lettre morte et ainsi donner raison aux Cassandres. C’est une responsabilité que se partagent l’État et les acteurs de la presse. L’industrie doit se donner les moyens de la réforme et l’État repenser son action pour passer d’une logique d’aide à une logique d’investissement. l ESCP-EAP MAGAZINE N° 123 - Mars 2009 17

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