Confluence, le magazine de l’Agence de l’eau Seine-Normandie - N°64 - Avril 2017 - 21

Les clés
pour comprendre

Le projet OCAPI s'est fixé
quatre objectifs :
* établir un bilan
du fonctionnement de
l'agglomération parisienne
en termes de flux
des nutriments ;
* recenser les alternatives
théoriques ou existantes
et évaluer leur potentiel à
travers des voyages d'étude
en France et en Europe ;
* comprendre les verrous
et les leviers à la transition
écologique de
l'assainissement ;
* favoriser l'émergence
de projets et le travail
avec des acteurs
opérationnels pour mener
des expérimentations
à différentes échelles.
À l'échelle du Grand Paris, la baisse attendue du débit de la Seine combinée à l'augmentation de la population
va provoquer un effet ciseau qui rendra inatteignable l'objectif de bon état des eaux.

Quel serait ce nouveau paradigme ?

F. E. : L'assainissement est officiellement reconnu comme

un métier de la croissance verte mais notre mode de gestion
des eaux usées reste très consommateur d'énergies fossiles
et se révèle inopérant pour la valorisation des ressources.
Les taux de recyclage de l'assainissement de l'agglomération
parisienne sont d'environ 40 % pour le phosphore, 20 %
pour le carbone et 5 % pour l'azote. Les stations d'épuration
doivent évoluer mais cela ne sera pas suffisant. Les limitations techniques liées au mélange et à la dilution invitent
pour l'avenir à coupler l'évolution technique des stations
d'épuration avec la séparation à la source des urines et des
fèces. De nombreuses recherches menées par nos voisins
européens ont déjà montré un fort potentiel environnemental. Cette nouvelle conception de l'assainissement
pourrait permettre une valorisation presque totale des
ressources carbonées, azotées et phosphorées des eaux
usées, des consommations énergétiques moindres, des
rejets au milieu naturel très fortement réduits et des
consommations d'eau plus faibles.

Concrètement, comment le mettre en œuvre ?

F. E. : Nous étudions les possibilités de mise en œuvre d'une

collecte séparée des urines à la source. Des projets similaires
existent déjà dans de nombreux pays et des types d'habitat
très variés : lotissements en Suède et en Allemagne, habitat
rural en Afrique et en Inde, bâtiments universitaires en
Suisse... Certaines solutions technologiques sont encore
expérimentales mais beaucoup de systèmes ont déjà fait
leurs preuves. Pourtant, malgré son expertise reconnue dans

l'assainissement, la France a pris un retard considérable sur
la recherche, l'innovation, la mise en œuvre et le développement de filières économiques de séparation à la source.
Une première expérimentation portant sur la collecte et la
valorisation de l'urine d'un urinoir sec masculin est en cours
sur le site de l'École des Ponts ParisTech et le SIAAP prévoit
d'installer une collecte d'urine sur le site d'Achères. Ces nouvelles approches s'inscrivent dans une démarche de reconnexion avec l'agriculture car l'urine contient tous les nutriments utiles pour un recyclage agricole.

Quelles sont les perspectives pour
l'assainissement à l'échelle d'un territoire
comme le Grand Paris ?

F. E. : À l'échelle du Grand Paris, la baisse attendue du
débit de la Seine, de l'ordre de 30 % d'ici à 2050, combinée à l'augmentation de la population va provoquer
un effet ciseau qui rendra inatteignable l'objectif de bon
état des eaux. Les études que nous avons réalisées dans
le cadre d'OCAPI sur le territoire de Saclay, montrent
qu'il est possible d'équiper des logements nouvellement
construits de toilettes à séparation d'urines qui pourraient être collectées de manière sélective, créant ainsi
une nouvelle filière de valorisation et de nouveaux emplois. La séparation à la source constitue une voie prometteuse d'adaptation au changement climatique, de
diminution des consommations d'eau et de préservation
des milieux aquatiques qui ne doit plus être négligée.
Catherine Salon

En savoir plus
Sur le projet OCAPI :
leesu.univ-paris-est.fr/
OCAPI-presentation.html

AVRIL 2017 -

http://leesu.univ-paris-est.fr/OCAPI-presentation.html

Table des matières de la publication Confluence, le magazine de l’Agence de l’eau Seine-Normandie - N°64 - Avril 2017