Confluence, le magazine de l’Agence de l’eau Seine-Normandie - N°62 - Septembre 2016 - 27

« Il est très rare
d'observer une telle
diversité architecturale
le long d'un canal. »
Philippe Ménager

Une navigation très vite concurrencée
Essentiellement emprunté pour le commerce, le canal de Bourgogne permet aux
mariniers de transporter du grain, du sable
et du gravier ainsi que des produits bourguignons (vin et blé). Entreprises et usines
de matériaux lourds - cimenteries et scieries, notamment - s'installent alors sur les
berges du canal. Mais dès 1851, la concurrence avec la toute nouvelle voie de chemin
de fer est rude. « Il faut dire que le trafic
fluvial est lent, rappelle Philippe Ménager.
Les premiers bateaux ne naviguent que grâce
à la force motrice humaine. Le halage par les
mulets ou les chevaux permet ensuite d'augmenter un peu la vitesse de croisière. Mais le
franchissement de la voûte de Pouilly demeure
un obstacle car le tunnel n'a pas de chemin de
halage. Pour faciliter le passage du tunnel, un
toueur, remorqueur à vapeur engrené par une
chaîne immergée, est installé, et tire les bateaux. Il est remplacé quelques années plus
tard par un toueur électrique. » Mais cela ne
suffira pas. La deuxième moitié du XXe siècle
voit la navigation commerciale sur le canal
peu à peu abandonnée (surtout dans sa
partie centrale) au profit des voies plus rapides, qui ont été construites en empruntant souvent les mêmes vallées.

hauteur du bief, les ingénieurs entament
en 1825 la construction d'un tunnel traversant la montagne. Baptisé « la voûte », ce
tunnel de plus de 3 kilomètres est lui aussi
réalisé en plusieurs tronçons. Pas moins de
32 puits sont creusés sur toute sa longueur
afin de permettre l'extraction des matériaux
et le passage des ouvriers. Après sept ans
de travaux, le plus haut bief d'Europe
culmine à 378 m d'altitude - un record pour
l'époque -, pour près de 300 m de dénivelé.
Et le canal est ouvert à la navigation sur
toute sa longueur. « En réalité, il fallut donner
une prime pour motiver le premier batelier
à passer sous Pouilly ! » raconte Philippe
Ménager.

Remorqueur électrique
sortant du tunnel du canal
de Pouilly-en-Auxois.

Bief de partage des eaux
du canal de Bourgogne
et le remorqueur électrique.

En pratique

Un canal, comment ça marche ?

n canal est conçu comme
une succession de plans
d'eau horizontaux - des
biefs - séparés par des écluses.
Le tout permet de se libérer des
contraintes de la dénivellation
et des régimes hydrologiques.
Il n'y a donc ni courant, ni crues,
ni sédimentation. Énorme
machine hydraulique, la
consommation en eau d'un canal
est très importante. Dans le cas du

Un atout patrimonial
Aujourd'hui, le canal de Bourgogne garde
une valeur identitaire forte. Grâce à une offre
touristique originale et à un aménagement
en voie verte, il connaît un regain d'intérêt.
Au-delà du cadre bucolique et paisible, c'est
aussi une belle ouverture sur l'arrière-pays
bourguignon et la richesse de ses terroirs.
« La particularité du canal de Bourgogne, c'est
aussi qu'il a subi la patte de tous les ingénieurs
qui ont participé à sa construction », ajoute

canal de Bourgogne, les rivières
de l'Ouche et de l'Armançon
n'étaient pas sufﬁsantes à une
alimentation en continu. C'est
pourquoi cinq grands réservoirs
ont été construits sur les hauteurs
de Pouilly pour collecter les eaux
de pluie et des petites rivières
annexes. Achevés en 1845,
ces réservoirs constituent
l'aboutissement d'un rêve vieux
de trois siècles.

Philippe Ménager. Et de conclure : « Maisons
éclusières,ponts-canaux, réservoirs... il est très
rare d'observer une telle diversité architecturale
le long d'un canal. »
Camille Aulas

Références
Les canaux bourguignons : Histoire d'un patrimoine,
Philippe Ménager, aux éditions de l'Escargot Savant,
416 pages (ouvrage malheureusement épuisé).

SEPTEMBRE 2016 -

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