Ifremer Biodiversité au journal le marin du 26 février 2010 - (Page 1)
Les Rendez-vous Espèces marines invasives, phénomène irréversible Les invasions biologiques dues aux introductions d’espèces sont, avec la surexploitation des ressources, les pollutions et le changement climatique, l’une des pressions majeures exercées sur la diversité biologique. a mondialisation de l’économie et des échanges stimule l’accélération de ce phénomène, car l’action de l’homme est souvent à son origine. Parmi les principaux vecteurs d’introduction et de transferts d’espèces en milieu marin, on trouve en effet les eaux de ballasts et le fouling des navires. Les activités de pêche aux engins traînants qui dispersent les espèces constituent des facteurs secondaires qui permettent leur progression. Toutes les espèces introduites ne sont pas invasives et réciproquement. Selon l’UICN1, est invasive « toute espèce qui, s’étant établie dans un nouveau domaine géographique pour elle, y est un agent de perturbation et nuit à la diversité biologique. Ce sont généralement des espèces introduites mais pas uniquement ». Leurs traits communs ? Elles occupent des niches écologiques dépourvues de prédateurs. Elles sont très opportunistes et s’adaptent à de fortes amplitudes de température, salinité… Elles sont résolument armées pour coloniser l’espace et leur invasion des milieux marins peut être très rapide car il est très difficile d’y intervenir. Le vers marin Ficopomatus enigmaticus, répertorié dans les eaux saumâtres des zones tempérées subtropicales, a ainsi vu sa dispersion favorisée sur nos côtes par l’essaimage des salissures présentes sur les navires. Son inconvénient majeur est de coloniser les coques de bateaux, les bouées et les structures portuaires en général. Une étude menée par l’Ifremer a permis de formuler en 2000 des recommandations2 pour limiter certaines nuisances en milieu portuaire. Originaire de la façade atlantique de l’Amérique du Nord, la crépidule (Crepidula fornicata) s’est répandue sur les côtes européennes à l’occa- de la biodiversité marine Interview Dominique Hamon, Laboratoire Écologie benthique (Ifremer) “ Un colonisateur bien armé À quel titre vous intéressez-vous à la crépidule ? De longue date, nous avons cartographié et évalué les stocks de crépidule en Bretagne Nord et suivi leur évolution. Avec divers partenaires, nous avons entrepris des études comparatives intersites pour identifier les mécanismes de sa prolifération et caractériser ses effets sur le milieu. Plus récemment, nos travaux ont conduit, en baie du Mont Saint-Michel, à étudier la compétition trophique entre la crépidule et les mollusques filtreurs cultivés. Face aux problèmes posés par la prolifération de la crépidule vis-à-vis des activités de pêche (baie de SaintBrieuc) et d’ostréiculture (baie du Mont Saint-Michel), nous avons accompagné l’association Areval dans son projet d’exploitation et de valorisation de la crépidule. Quel est l’impact sur la biodiversité ? Superposées en « chaînes », les crépidules colonisent tous types de fonds marins côtiers. sion de transferts d’huîtres et, faute de prédateurs, elle se retrouve désormais de la Suède à la Méditerranée. Depuis 1980, le gastéropode fait l’objet de diverses études par l’Ifremer. (voir l’interview). de moules zébrées qui bloquent les moteurs, explique Daniel Masson, du Laboratoire Environnement Ressources des Pertuis Charentais. En France, des espèces toxiques comme Alexandrium catenella sont apparues en 1994 dans l’étang de Thau ». La solution ? Une résolution de l’Organisation Maritime Internationale recommande aux navires de rincer leurs citernes à ballast en haute mer, un écosystème moins riche. Mais surtout, une convention internationale se met en place pour imposer un traitement des eaux. Un véritable défi technique qui s’impose. « Au contraire d’accidents comme les marées noires dont les traces finissent par disparaître, conclut Daniel Masson, les invasions sont irréversibles ». (1) Union Internationale pour la Conservation de la Nature. (2) http://wwz.ifremer.fr/envlit/content/ download/27417/222402/version/1/file/ triniteficoresume.pdf © Ifremer/O. Dugornay L FACTEURS HUMAINS Dans le domaine végétal, on peut citer le cas de la sargasse (Sargassum muticum) et de la caulerpe (Caulerpa taxifolia), qui se sont développées très rapidement sur nos côtes après leur introduction. Divers travaux scientifiques, comme le réseau de surveillance Rebent des fonds marins côtiers, contribuent à mesurer le développement de ces espèces à l’aide de cartographie, d’évaluation des stocks, d’analyse des peuplements, de dynamique des populations, d’écophysiologie… L’Ifremer participe aussi à des programmes européens qui visent à offrir une solution à la problématique des eaux de ballast. L’activité de ballastage/déballastage est indispensable et chaque année, plusieurs milliards de mètres cubes d’eau sont transportés par les navires dans le monde entier. Mais les rejets constituent un risque pour les écosystèmes aquatiques. « Les grands lacs américains sont par exemple confrontés, via ce phénomène, à une invasion du 26 Février 2010 Mode de reproduction, régime filtreur, absence de prédateurs… la crépidule est une espèce bien armée pour coloniser les fonds marins côtiers. Elle a d’abord occupé les alentours des bassins conchylicoles puis, à la faveur de la dissémination naturelle et de celle opérée par les engins de pêche traînants, elle a élargi son aire de distribution. Elle finit par coloniser tous les types de fonds en les modifiant. Elle les envase par la production de biodépôts, et élimine progressivement la plupart des espèces d’invertébrés qui vivent dans le sédiment. Les « chaînes » formées par le gastéropode permettent aux larves de crépidules de s’y fixer ainsi que celles d’autres invertébrés. En terme de diversité, on peut donc schématiquement considérer que la perte des espèces vivant dans le sédiment est « compensée ». Le plus dommageable, c’est la banalisation des fonds envahis par la crépidule et donc la perte de diversité des peuplements. EN SAVOIR X P Un recensement des espèces introduites en Bretagne (prochainement enrichi du volet marin) : http://www.bretagne-environnement.org/especes-invasives P Un dossier accessible à tous sur la crépidule : http://wwz.ifremer.fr/envlit/documents/dossiers/la_crepidule/ version_francaise Directrice de la publication : Pascale Pessey-Martineau - Rédacteur : Dominique Guillot Rédactrice en chef : Clémentine Jung -155, rue Jean-Jacques Rousseau - 92138 Issy-les-Moulineaux cedex Les Rendez-vous de la biodiversité marine - publiés dans “
http://wwz.ifremer.fr/envlit/content/
http://www.bretagne-environnement.org/especes-invasives
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