Produits de la mer-n°153-Juin 2015 - 51

sur la consommation intérieure, traditionnellement l'une des plus élevées en Europe
avec 26 kg/habitant chaque année.
Les principales espèces concernées sont
le thon, les poissons bleus et les moules. Le
thon notamment, au cœur de l'industrie
espagnole, a fait bouger les lignes du marché européen ces dernières années. JeanFrançois Bodin est installé à Murcia, à la tête
de Moalia, société familiale de droit espagnol fondée en 1994. « Nous importons et
vendons du thon frais et de l'espadon en
Europe, en sashimi ou bloc de thon, indiquet-il. Mais le marché français est désormais
centré sur le prix et peu perméable à la qualité que nous proposons, à 16-20 €/kg en provenance du Sri Lanka ou des Maldives par
avion. La culture sushi a remodelé le marché,
mais là, nous subissons de plein fouet l'arrivée
de thon transformé à 11-12 €/kg. Du coup,
nous travaillons davantage en Angleterre,
Belgique, Allemagne, Luxembourg... » Pour
ce connaisseur, la crise a été dure, mais
l'ouverture sur les marchés extérieurs à
l'Espagne a été salvatrice : « Longtemps,
les entreprises se sont contentées du marché national. La crise les a forcées à s'ouvrir à
l'Europe. Et avec l'amélioration économique
visible aujourd'hui, les banques sont prêtes
accompagner les PME dans leur développement et leurs investissements. »
Jurgen Smet, actuel gérant de Maguro,
société de négoce de thon installée en

Suisse, avait créé une unité de stockage
et de transformation en Galice. « Nous
avons stoppé la production de Tuna mar en
novembre et fermerons définitivement cet
été. » Ouverte en 2006, avec des subventions espagnoles et européennes, l'usine
était dédiée au thon sashimi et disposait
d'une chambre froide de 2 000 t pour le
-60 C°. « Nous proposions longe et steak
de thon et d'espadon, décongelé en refresh
et en barquette sous atmosphère modifiée pour la grande distribution. À 40 % en
Espagne, le reste pour l'export. Mais la crise
a freiné l'activité et l'arrivée du thon injecté
l'a achevée. Le marché espagnol a tiré rapidement les prix vers le bas et nous avons
perdu notre clientèle avec des écarts de
7-8 €/kg. Nous avons nous aussi travaillé
l'injecté, mais la guerre était trop dure avec

%
des captures de l'U.E.
(en valeur)

Source : Scientific and
Economic Committee for
Fisheries (STECF)

T.N.

Thierry Nectoux

Dossier ❘ ESPAGNE

trop d'intervenants. » Dernier clou sur le
cercueil, les coûts énergétiques (électricité et gaz) ont flambé en 2014 et fait
bondir les frais de stockage.
Jurgen Smet est retourné à son activité de négoce. Il fournit notamment les
grands opérateurs du marché. Comme
tout le monde, il attend les évolutions
de la réglementation européenne quant
aux nitrites injectés, une pratique qui a
fait augmenter les volumes mais dont le
cadre juridique reste flou. « C'est clair dans
la grande distribution espagnole qui affiche
la liste des additifs. Le gouvernement défend
le dossier et ce type de produit à ses propres
avantages. Mais tout le monde doit être à la
même enseigne. L'injecté... c'est de l'injecté.
Les différents marchés devraient pouvoir
vivre en parallèle. » ■

Au royaume de l'aquaculture

'Espagne est le premier aquaculteur d'Europe, avec une production de près de
280 000 t. Plus de 5 000 établissements (27 000 emplois) participent à la culture et
à l'élevage de moules, bars, dorades, turbots et autres truites arc-en-ciel. Une dynamique que la ministre espagnole de l'Agriculture, de l'Alimentation et de l'Environnement (Magram), Isabel Garcia Tejerina, entend voir se poursuivre. Elle a récemment
annoncé le lancement d'un plan pluriannuel (2014/2020) destiné à soutenir le secteur et abondé de 421 millions d'euros.
Dans un autre domaine, l'Espagne a annoncé l'ouverture en juin, à Murcia, du plus grand
centre d'élevage au monde de thon rouge en volume.

PRODUITS DE LA MER N°153 JUIN 2015

❘ 51 ❘

Produits de la mer-n°153-Juin 2015

Table des matières de la publication Produits de la mer-n°153-Juin 2015